Le bal royal (EVENT)

Introduction

La guerre contre les démons était terminée depuis maintenant un mois et demi. La cité avait retrouvé un calme qui lui avait tant manqué durant les derniers mois. Pour marquer cette nouvelle ère de paix et promouvoir sa nouvelle politique, la nouvelle reine décida d'organiser un grand bal rassemblant la haute société de Targatt. Tous les membres importants de la cité étaient conviés. Malheureusement, aucun crieur public n'avait annoncé l’événement. Il s'agissait d'un bal réservé à une élite et le peuple n'y avait pas sa place. Ils seraient de toute façon malvenus parmi les membres importants du royaume. Pour quelques-uns de ces derniers, ce serait une occasion de se divertir et de prendre du bon temps après de longs mois de terreur et de guerre. Pour les autres, il serait l'occasion rêver pour placer ses pions et se faire des connaissances dans les différents milieux importants de la cité.

Le soir du 16 mai 1235, les portes du palais s'ouvraient aux participants du bal. À l'entrée, des membres de la Garde Royale s'assuraient de l'identité de chacun en les soumettant à un cercle de vérité. Ainsi, ils pouvaient confirmer leurs noms et leurs occupations au sein de la cité. Les quelques personnes qui se présentaient sans avoir été invitées se virent refuser l'accès au Palais et cela sans aucune forme de procès. Pour ceux qui insistaient un peu trop, ils furent amenés dans les prisons du Palais où ils resteraient jusqu'au terme de la soirée. Bien qu'extrême, cette précaution, prise à la demande de Sa Somptueuse Majesté, éviterait que les perturbateurs ne viennent provoquer quelques vagues au cours du bal où ne perturbe la sécurité de la Reine.

Finalement, les invités pénétrèrent dans le palais. Ils pouvaient entrer dans la Salle du Trône, magnifiquement décorée pour l'occasion. Des membres de la Garde Royale étaient postés à différents endroits dans la salle. Ils portaient leur armure de fonction et s'assuraient que la soirée se passait sans aucun problème. En cas de combat déclaré ou même de simple petite querelle, ils pourraient séparer les individus et les expulser de la soirée. Durant cette fête où le protocole était de mise, la violence ne serait pas tolérée. Telles furent les volontés de la reine. Une ambiance de joie et de fête, pour fêter le retour au calme de la cité. Et, elle l'espérait, des années de paix.

Devant les invités se dressaient de longues tables contre les murs de la salle où l'on pouvait voir différents plats ainsi que des coupes de vin spécialement servies pour l'occasion. Au bout de la salle du trône, la reine était assise sur le magnifique Trône de la cité. Le dos droit et le regard balayant la salle. À ses côtés, on pouvait voir les différents membres du gouvernement. À sa droite, tout installée sur des sièges placés au préalable. Parmi ceux-ci, le chancelier du royaume, le grand argentier, la haute juge de la cour ainsi que le capitaine de la garde royale. On trouvait les membres de la maison de la reine à sa gauche. Le chambellan, le maître d'armes, le barde royal. Alors que les derniers invités sont entrés dans la salle, la voix d'un homme d'un certain âge en armure de la garde retentit dans la pièce.

-Oyez, oyez! Par la présente, Sa Majesté la reine Luthien Nylaathria, reine de Targatt, d'Arakis, de Malghir et maréchal des armées du royaume, va prendre la parole!

La voix amplifiée par la magie résonna dans la pièce et, peu à peu, le silence se fit. L'homme, qui s'avérait être le nouveau commandant de la garde royale s'inclina devant la reine et reprit sa place près d'elle. La reine fut celle qui brisa le silence en prenant la parole, et ce pour la première fois devant tous les grands du royaume.

Le Retour

Depuis deux mois, la vie n'avait pas été tranquille pour moi. La victoire sur les démons dans la Vallée d'Helmancourt, la conquête rapide d'Arakis et Melghir, le sauvetage de mon protégé Cain Leckard, l'admisnistration de deux cités revenant de monde des ombres et enfin les longues et difficiles négociations avec Targatt. Avoir créé la Vice-Royauté m'octroyait la grandeur à laquelle j'avais toujours aspirée et sans aucun remord, je m'étais octroyée ce titre désormais héréditaire de Vice-Reine. En plus de cela, en dépit que ce que pouvait bien penser les partisants de la Reine, même si j'en faisais parti, je restais à la tête de la plus puissante armée de mage du continent. Le temps et les moyens que pourront m'offrir, à l'avenir, les deux cités sous mon emprise me permettront de grandir les effectifs de cette armée, solidifiant à jamais le règne de ma dynastie et rendant une tentative sournoise de Targatt d'annexer mes terres presque impossible. Il y avait bien les mnoeuvres politique et dynastique. Toutefois, l'accord entre le Reine et moi de régler ce genre de détails en liant ma future Couronne et le Trône éviterait une telle situation.

J'arriverais donc dans le lieu de cette fête avec un sourire aux lèvres. J'avais quitté, il y a longtemps, cette cité en ayant le surnom de sorcière, j'y étais revenue avec celui de héro et maintenant, je pouvais prétendre y rentrer avec le titre somptueux de Vice-Reine. Diable que je pouvais ressentir une satisfaction à l'idée que cette ascension fut fructueuse et que maintenant, je pouvais vivre parmi les grands et même au dessus d'eux, me permettant de reléguer au passé des années de mépris et de raillerie de ces mêmes individus. Eux qui, autrefois, ne voyaient qu'une germaine réfugiée à côté d'eux devrait me devoir le respect et la déférence que l'on doit à ceux qui leur sont désormais supérieur en sang, en rang et en honneur. Je ne pouvais que me délecter d'avance des regards obligés de se plier aux codes de bonne conduite de notre société en me voyant. Je ne pouvais qu'envisager avec impatience ces flammes dans le regard de ceux qui viendront me rendre hommage, comme pour éviter que je ne les prenne en grippe, alors qu'hier encore, ils ne me voyaient que comme une usurpatrice, une traître, un monstre.

Le Destin faisait bien les choses et récompensait aussi bien la patience que le travail. J'en étais la preuve et ce soir, je comptais bien prendre une douce revanche sur ceux qui m'ont autrefois sous-estimé et ceux qui eurent la mauvaise ambition de me diminuer. Pour cela je ne comptais pas rester invisible, portant une modeste armure à la germaine, privilégiant la protection et la praticité à la flamboyance. Non, ce soir, j'allais porter le mélange des cultures à son paroxysme, imposer ma présence à l'oeil de tous, asseoir ma puissance et mon prestige en rappelant à tous que désormais, au côté du Trône surplombant toute la cité, il y avait une Couronne qui veillait sur lui. Et bien qu'elle ne dispose pas des mêmes pouvoirs et de la même puissance intrinsèques, cette Couronne était le prolongement d'une puissance martiale et commerciale que tous devrait respecter et craindre comme nous autres nous respections les Valkyries, filles de Lehadín, gardiennes du Valhalla et féroces combattantes auxquelles, ce soir, j'allais emprunter une partie de la représentation.


Mais je n'étais pas stupide. Mon règne débutait sur des terres qui n'avaient rien de germaines et comme le premier roi d'Hochseegrad, frère du roi d'Hésandre il y a presque six cent ans, j'étais bien obligée d'adopter des codes martiaux du peuple sur lequel je régnais. Ainsi mon armure de cuire et de maille laissa place à des parties d'armure lourde et de plaque et les ailes de mon casque, qui auraient dû être de plume de cygnes, furent remplacées par deux ailes d'acier. Des plumes y furent gravées par des orfèvres et le détail rendait le métal presque aussi doux et soyeux à l'oeil que les plumes qu'il imitait. Puis vinrent les draperies, toutes produites sur mes terres pour révéler mon attachement à l'industrie de mon fief. Le tissu était fin et soigné. Il n'aurait certainement rien à voir avec les draperies dont se pare la Reine. Mais y a-t-il un seul artisan humain en ce monde capable d'égaler la patience et le savoir faire des elfes ? Tout ceci n'enlevait rien à la beauté et à la finition du tissu, sublimé par les broderies d'or et les pierres précieuses serties dessus, transformant le modeste pourpre et blanc de mon voilage en un flamboyant étendard de ma puissance, mon prestige et ma nouvelle richesse.

Ainsi habillée, il ne me restait plus qu'à entrer dans le Palais puis la Salle de Trône. Même si le fait de devoir me soumettre, au même titre que les bourgeois de Targatt, au cercle de vérité de la Nouvelle Garde Royale me déplaisait fortement, je ne fis pas de vague. Ainsi, je pus pénétrer, laissant mon escorte en dehors de la salle, dans le lieu du bal, ma nièce derrière moi et dûment annoncée, je m'avançais jusqu'au Trône et la Reine. Comme à son habitude, même si ses habits gris lui donnaient une stature bien trop simple et sérieuse alors que ce bal devait être l'introduction officielle de son règne, sa beauté froide n'était pas sans effet. Je restais une germaine et pouvait apprécier la beauté aussi bien chez les humains que chez les autres races civilisées. Néanmoins, au delà de la beauté froide de la Reine, la regarder me faisait penser qu'elle avait plus de 300 ans et cela m'imposait de réfléchir à l'avenir. Les Germains étaient connus pour physiquement bien vieillir, mais cela ne m'empêcherait pas de me faner. Enfin, l'heure n'était pas à ce genre de réflexions et au pied du Trône, je saluais uniquement Sa Majesté, à la germaine, légèrement penchée en avant et une main sur le coeur. Puis, après avoir reçu la permission de Sa Majesté de me relever, je m'écartais, laissant les autres convives d'importance se présenter. Moi, j'allais simplement m'écarter un peu, mais juste assez pour voir comment ma nièce, mon successeur officiel, allait réagir à devoir saluer Sa Majesté devant autant de monde et ce dans une tenue qui devait faire valoir, tout autant que la mienne, la puissance de notre famille.

Je ne fus pas déçue et pu apprécier, ma nièce à mes côtés, le discours de Sa Majesté. Un discours sur la beauté de l'avenir de Targatt si elle était reconstruite avec toutes ses forces vives. La références à Melghir et Arakis me fit sourire. Sa Majesté était habile, je l'avais bien compris depuis l'instant où nous nous étions rencontrées, pour la première fois, au Fort Helmancourt, peu de temps avant la bataille homonyme. Elle ménageait tout le monde et en même temps, lançait un avertissement à ce qui, personnellement, me paraissait être un problème : les Paladins. Comme les Ethéristes, ils n'étaient qu'une secte et devait être contrôlés. Leur allégeance à la Lumière ne les prévenaient pas d'excès. Cette question devrait cependant attendre les naturelle discussion avec les convives. Même si j'avais assuré à la Reine que je n’interférais pas dans les affaires internes, autre que celle de la succession au Trône, de Targatt.  

Depuis mon arrivée à Targatt, il y avait bien une chose à laquelle je n'avais pas vraiment été confrontée : la haute société. Quand j'étais arrivée, j'étais constamment avec ma tante pour les préparatifs de la Grande Armée en vue de l'inévitable bataille avec les démons. Puis elle m'avait placée aux côtés de la Reine Luthièn pour servir d'officier de liaison afin de facilité et protéger les communications entre la Grande Armée et la Salle du Trône au moment des hostilités. Puis, j'étais entrée à l'Académie tout en devenant pupille de la Reine Luthièn.

Ce dernier statut aurait dû me confronter à mes obligations de membre de la famille Schlacht, proche parente de la nouvelle Vice-Reine d'Arakais et Melghir, ma propre tante, et faire que j'aurai dû voir à de nombreuses reprises la Reine et ceux qui formaient sa cour. Et pour cause, en étant sa pupille, je devenais une membre à part entière à cette cour. Toutefois les choses furent telle que je ne vis pas l'ombre d'une missive me demandant de me présenter au palais ou de participer à quoi que ce soit. Il devait alors y avoir deux choses à l'oeuvre. D'abord la reconstruction de la cité après la guerre qui devait monopoliser presque tout le temps de la Reine. Ensuite, les inévitables négociation que deux géant politiques allaient menées entre eux. La Reine et la Vice-Reine devaient régler de nombreux détails et ceux-ci avaient certainement dû me maintenir à distance. Après tout, je pouvais être une oreille attentive au service de ma tante.

Je ne devais pas mentir que ce fut parmi les ordres de ma tante quand elle me laissa quitter la Grande Armée à plein temps pour entrer à l'Académie. Avec son départ pour Melghir, elle avait besoin de quelqu'un qui restait au courant des choses et pouvait avoir des informations de premières mains. Malheureusement pour elle et heureusement pour moi, je restais loin des centres de pouvoir ce qui l'empêchait de vraiment obtenir toutes les informations qu'elle voulait quand, le soir, loin des regards, nous parlions à distance. Mais cette réalité me permettait de me concentrer sur mes études et sur cette nouvelle chose que je n'avais pas eu au Bastion : des amies.

Il y avait Harmony a qui j'apprenais à se battre et qui commençait à un peu trop s'emballer face aux progrès qu'elle pouvait faire. elle pensait que ce qui était acquis  l'était. Mais combattre est un entraînement de tous les jours et j'essayais de rester délicate avec elle. Je ne pouvais pas me permettre de me donner à mon maximum contre elle au risque de la blesser et de l'irriter. Il y avait ensuite Delphine, le jolie petite elfe que j'avais croisé dans les jardins de l'Académie. J'aimais vraiment être avec elle. C'était reposant. Sa timidité était difficile à dépasser et même si j'essayer de lui simplifier la vie, parler librement avec elle était comme traverser un récif. Le moindre faux mouvement pouvait la faire se refermer. Pour autant je ne désespérais pas. Je l'aimais bien et j'avais envie d'apprendre à la connaître davantage, de passer un peu plus de temps avec elle. Mais bon, pour cela peut-être fallait-il que je paraisse moins intimidante à côté d'elle.

Chose difficile avec ma carrure, ma taille et ma musculature. J'étais une combattante à la germaine, pas une petite et toute jolie fleure elfique. Dès lors, je devais trouver une parade. Parade que j'aurai sincèrement préférée ne pas voir à subir et encore moins dans les conditions d'un bal. Car malgré moi, j'allais peut-être pouvoir montrer à Delphine que je n'étais pas si terrifiante que ça si je n'avais pas grand chose sur moi ! Mais j'aurai préféré ne pas la brusquer, elle pourrait se refermer plus à cause de ça. Mais ma tante, à qui je me gardais bien de formuler dans mon manque d'enthousiasme à porter la robe qu'elle avait l'intention de me faire porter au bal de la Reine Luthièn la raison Delphine, finit par m'imposer de porter la robe que ses femmes de chambres m'enfilaient.

Elles étaient arrivée presque une demie-journée avant le bal, et bien avant ma tante, pour m'habiller, me coiffer et me toiletter. Chose qu'elle firent au Fort Helmancourt, dans les anciens appartements de ma tante. Diable pourquoi devais-je me faire toiletter par autrui ? La réponse des femmes de chambre de ma tante, toutes originaires d'Arakis ou de Melghir fut simplement que c'était comme ça dans leur cité. Une bien belle explication pour une fille comme moi qui faisait tout soit même. Pire ! Pour ma tante ! Les Germains se passaient bien de serviteurs en privéa lors pourquoi, maintenant, elle agissait comme les nobles d'Hésandre et des villes libres d'Arakis et Melghir ?

Cependant, je devais admettre que la servilité de ces femmes de chambre étaient sans faille. Elles connaissaient leur place face à moi qu'elle ne cessait d'appeler "Votre Altesse" ou pour la plus protocolaire, "Votre Altesse Sérénissime", comme il était de coutume d'appeler les membres de la famille régnantes des cité d'Arakis et Melghir. Ma tante avait du reprendre les codes des nobles de ces cités pour favoriser l'acceptation de son règne. Après tout, comme elle me l'avait expliqué pour m'instruire, l'introduction de l'administration militaire en lieu et place de celle brisée et corrompue des deux cités marchandes faisait du bruit parmi ce qui restait de noble et de bourgeois. Elle devait donc le donner quelque chose en échange des grandes réforme qu'elle imposait. Tout ceci simplement pour dire qu'à l'instant, pendant qu'elles me déshabillaient, où je leur interdis de toucher au gant couvrant mon bras droit et aux bandages couvrant ma jambe gauche, les femmes de chambres de ma tante ne protestèrent pas et firent avec. C'était une inquiétude de moins.

Elles prirent un temps fou à me laver. Allant même de leur petit conseil pour éviter que je n'abîme ma peau, pour éviter que les cicatrices ne se voient, pour avoir de beaux ongles. L'une d'elle se moqua un peu en affirmant que mes cheveux blanchissaient malgré mon jeune âge. Ils ne blanchissaient pas. Non, leur racine s’éclaircissait ce qui voulait dire que j'allais devoir envisager une teinture prochainement. Toutefois pas maintenant, pas en présence des femmes de chambre, ce serait trop risqué. Au bout de deux heures dans des bains d'eau, de lait et autre, moi qui pourtant aimait beaucoup les bains, je commençais à m'ennuyer. Passer autant de temps à faire sa toilette, qu'elle perte de temps. en plus de cela, ça n'avait rien d'aggréable car elle ne cessait de passer leur éponge, de me faire tourner la tête pour pouvoir me laver les cheveux et ainsi de suite. Jusqu'à ce qu'elle finissent par me laisser tranquille dans le bain. Elles allaient préparer ma robe me disaient elles en me laissant profiter enfin, de l'eau chaude et du paysage bien visible depuis mon bain. Là, enfin, c'était reposant.

Ce ne fut pas très long malheureusement. J'avais fermé les yeux et quand je les rouvris parce qu'une fois de plus on m'appelait "Votre Altesse Sérénissime", j'avais l'impression que quelques secondes étaient passées. Toutefois, les femmes de chambre m'affirmèrent m'avoir laissé dormir une bonne demi-heure avant de devoir me réveiller pour ne pas prendre de retard sur mon habillage. Une demi-heure ? Etais-je à ce point fatigué ? Je savais que je passais beaucoup de mon temps à étudier et à m'entraîné et que je m'imposais des heures de sommeil en moins pour aider Harmony, mais au point de m'endormir sans crier garde ?

La question resta en suspend car les femmes de chambre m'amenèrent à une coiffeuse devant laquelle elles m'assirent et commencèrent à prendre soin de mes cheveux et de mon visage. Je voyais bien à leur très légère grimace qu'elles n'étaient pas enchantées par l'état de mon corps. Je n'en prenais pas vraiment soin et à dire vrai, je n'avais commencé à le faire que depuis les bains d'après entraînement chez Harmony où, dans mon entrainement pour devenir plus féminine, elle me faisait passer un temps certain. Mais pas autant que maintenant ! Et là, j'étais contrainte de subir la totalité des soins existant dans le Monde Connu ! Je devais toutefois être sincère, c'était agréable, bien plus que dans le bain où je me faisais manipuler dans tous les sens. Là, tout était fait en douceur et en délicatesse. Tout sentait bon et j'avais bien failli me rendormir et ruiner, si cela avait été le cas, le travail d'une des femme de chambre. Heureusement, elle m'avait maintenue éveillé avant la catastrophe et toutes se mirent à me parler pour me garder éveiller. C'était assez étrange pour moi de parler de tout et de rien et encore plus avec des femmes de chambre, des servantes. Car chez les germains, il n'y a pas de rang parmis les serviteurs, pas de valet, de servante, de cuisinier en chef, juste des serviteurs et des servantes. Là elles me parlaient plus librement que de simples servantes sans pour autant devenir intime. Ca devait faire parti de ce surplus de luxe que s'offraient les femmes hésandrine et auquel on me forçait, sans grande résistance de ma part, de goûter.

Le travail derrière la coiffeuse fut long mais le résultat surprenant. Je ne m'attendais pas à découvrir presque une autre personne dans le miroir. Le travail qu'elles avaient fait été remarquable. Mes sourcils étaient taillés, mes cils avaient une taille que je ne soupçonnais pas, ma peau était lisse, deux longues boucles d'oreilles couleur or, comme mes yeux, ornaient mes oreilles, mes lèvres étaient d'un vert puissant et dure à la fois, rappelant mes sourcils et mes cheveux. Et mes cheveux, je ne pouvais croire que le paillasson qui me servait de cheveux pouvait avoir ce genre d'ondulation et de couleur éclatante. C'était très beau et je ne pus que féliciter les femmes de chambres qui furent quelque peu confuses pas ce geste. Elles m'avouèrent que depuis qu'habituellement, elles ne se faisaient jamais remercié, que cela ne se fait pas. Mais depuis qu'elles et d'autres femmes de chambre habilles des Germaines, ces dernières ne cessent de les remercier dès qu'elles font bien leur travail. Encore la simplicité des Germains qui frappaient me disais-je en me laissant diriger vers un paravent derrière lequel les femmes de chambre avaient mis ma robe.

Et c'était cette robe qui me posait un problème pour Delphine. En soit, elle ne me gênait pas pour autre chose. Je le trouvais même très belle. Cependant est-ce que les autres convives ne trouveraient-ils pas que ma tante en faisait trop ? Pour ma part, je n'allais pas lui désobéir et allais la mettre, d'autant que j'avais envie de me voir dedans et mettre en oeuvre tous les cours et conseil d'Harmony. Ainsi, les femmes de chambre prirent leur temps pour ajuster le tissu, au point qu'il épousait mes flancs, mon buste et mes hanches sans un plis et placer correctement les ornements. Puis elles me firent voir la robe et mon inquiétude quant à l'avis de Delphine ou des convives disparue. Cette robe était très belle, trop belle même. Je n'arrivais pas à croire qu'avec ma carrure d'ours, les femmes de chambre étaient parvenues à me donner un tel galbe.

Puis vint le moment d'aller à Targatt et au Palais d'Opale. Pour ne pas âbimer ma robe et tout le mal que les femmes de chambre s'étaient données pour moi, je demandais de moi même un carrosse. Ceci fit sourire ma tante, qui, comme toujours, était à cheval et en armure. Elle s'était bien fichue de moi elle qui m'avait affirmée qu'elle aussi serait en robe. Non, maintenant il n'y avait que moi et je comprenais pourquoi elle avait insisté pour que je sois aussi bien apprêtée : j'allais être au coeur de certaine conversation et habillée comme cela, je ne pourrais qu'être dans des conversations. J'allais donc simplement lui permettre de savoir des choses et de rencontrer des gens. Maintenant qu'elle était mariée, elle ne pouvait plus vraiment décemment jouer de ses attributs pour délier des langues. Il fallait que je prenne se rôle sans pour autant aller jusqu'à l'impensable.

Après une courte route, je n’emmitouflais dans un épais manteau de fourrure blanche qui se trouvait, comme par hasard dans le carrosse, et quittais mon moyen de transport. Puis je me soumettais au cercle de vérité et attendit d'être dûment d'être annoncée. Delphine était juste avant moi et du peu que j'avais pu voir, je la trouvais ravissante dans sa longue d'un pâle violet. Sa coiffure élaboré  rendait hommage à la finesse de ses traits et au travail des broderies sur sa robe. Je rêvassais un peu sur ces constatations quand mon nom et mon titre furent enfin prononcée par le crieur. Là, je décidais de me défaire de mon long et épais manteau de fourrure blanche en le laissant à un serviteur, révélant tout le soin porté par les femmes de chambre à ma personne.



Puis je me mis à l'allée menant au Trône pour présenter mes hommages à la Reine. Mes talons claquaient sur les dalles de marbres et je lançais un court sourire à Delphine avant de retrouver mon air sobre et droit habituel. Malgré mes talons, ma démarche était assurée, droite et un livre aurait pu tenir ma tête. ma robe qui mettait en avant mon corps scullpté et au galbe exacerbé s'avnçait jusqu'à la Reine jusqu'à ce que je puisse la saluer à la germaine. Si ma tante avait saluer la Reine ainsi, je me devais d'en faire autant.

Puis une fois la petite mise en scène mise en oeuvre par ma tante terminée, je marchais en sa direction, cherchant du regard la jeune elfe que j'avais croisé plus tôt.

Le bal

La jeune femme n’avait jamais imaginé qu'elle serait un jour amenée à entrer dans le palais royal. Du moins elle se l'était imaginé une fois ou deux mais en partant du principe qu'elle aurait pu être un membre de la garde royale. Quel honneur ça aurait été alors ?! Mais aujourd'hui, c'était officiellement qu'elle y était invitée pour représenter sa famille en tant qu'héritière... Une chose qui n'aurait jamais du se produire d'ailleurs. Elle n'était pas en tête de liste. Pourtant, son cousin lui avait annoncé la nouvelle quelques jours plus tôt. Et sa mère avait confirmé la chose. Ambre était désignée comme successeur de sa mère puisque les Heasley fonctionnaient en clan matriarcal.

Et cette dernière semble-t-il n'avait aucune envie d'aller à ce bal. Non pas parce qu'elle redoutait de s'y ennuyer ou que les ragots la fatiguaient, mais bien à cause de sa santé qui déclinait ces derniers mois. Une source d'inquiétude pour la jeune femme mais sa mère était suivie par les meilleurs guérisseurs, aussi elle ne devait sans doute pas trop s'en faire.

Quoi qu'il en soit, son nom avait été ajouté à la liste des invités et dès le lendemain, elle recevait une missive de Brann lui proposant de venir la chercher en carrosse. Elle qui désespérait à l'idée de devoir côtoyer tout ce beau monde sans en connaitre tous les codes, devint soudainement nettement plus encline à se choisir une toilette. Elle sélectionna une robe longue d'un somptueux bleu nuit qui imitait à la perfection une nuit étoilée. Une robe qui mettait en valeur ses courbes sans rien montrer. Malheureusement, sa mère décréta qu'elle était "trop triste" et ne lui laissa le choix qu'entre deux tenues. En les découvrant, Ambre en fut horrifiée. Après trois jours à tenter de faire changer d'avis sa mère, elle dut se résoudre à en choisir une des deux.

Certes elles étaient belles mais elles devraient être portées par des princesses de haut rang habituées à attirer les regards et certainement pas par elle. Elle avait le choix entre une robe rouge presque entièrement transparente, bien que des dentelles et broderies dorées cachent les parties intimes et la poitrine. Mais en plus d'un décolleté ahurissant, la voile était d'une finesse telle qu'il laissait ses jambes entièrement apparente, et nues forcément. Hors de question !

Pourtant l'autre n'était pas beaucoup mieux. Mais d'une part, la couleur était moins tape-à-l’œil, elle se mariait aussi sans doute mieux à ses cheveux roux. Et d'autre part, bien qu'elle laisse totalement apparaitre son dos et lui fasse un superbe décolleté, au moins elle aurait l'impression de porter un minimum de vêtements sur elle. Là encore le voile était si fin que des morceaux de peau apparaissaient de ci de là mais c'était toutefois moins alarmant.

Le soir même, Ambre avait été soigneusement lavée et apprêtée. Elle avait passée deux bonnes heurs à démêler ses cheveux qu'on lui avait coiffée en lui faisant une coiffure des plus complexes... qui n'avait pas tenu 10 minutes face au jeu qu'elle avait entamé avec son familier chat qui avait absolument voulu jouer avec elle.

Ambre se fit une fois de plus réprimandée par sa mère qui reprit elle-même les choses en main. Toutefois, elle se contenta de lui laisser les cheveux libres afin qu'ils viennent habiller les épaules de la jeune femme et encadrer son visage. Après tout, elle avait l'habitude d'attacher ses cheveux en natte ou en queue de cheval et le simple fait de les lâcher complètement était un énorme changement en soi.


On lui annonça que le carrosse de Brann était arrivé mais elle fut contrainte de le faire patienter quelques minutes le temps que sa mère "l'inspecte" une dernière fois tout en lui donnant ses dernières recommandations. De qui se méfier, de qui essayer de s'approcher, ne pas trop parler et ainsi de suite si bien qu'Ambre décrocha avant la fin du discours et y coupa court pour se précipiter dehors.


Brann, galant comme toujours, la salua d'un baise main et la complimenta sur sa tenue.
La jeune femme prit place aux côtés du jeune homme et le remercia en souriant d'un air un peu gêné, aussi bien de sa tenue que de se dire que tous les verraient arriver ensemble.

Une fois arrivés au palais, il lui proposa son bras. Une invitation à laquelle elle répondit sans se faire prier.
Puis, ils remontèrent l'allée pour présenter leurs hommages. Ambre se plia dans une révérence des plus gracieuses en adressant un sourire au gouvernement qui trahissait sa joie d'être là -finalement- et montrait la reconnaissance qu'elle leur vouait pour leur travail. Comme tous les citoyens devaient l'être d'ailleurs non ? Reconnaissants.
Elle laissa ensuite la place à la personne suivante.

Le bal royal

La jeune femme avait été ravie d’apprendre qu’un bal était organisé par la royauté et son gouvernement. D’abord car ça permettrait sans doute de redonner un peu de baume au cœur des présents, qui feront sans doute de même auprès de leurs suivants de sorte qu’au final toute la cité soit imprégnée par ce sentiment doux d’apaisement. D’autre part, Alleyne avait toujours apprécié les mondanités. Sans en être la plus friande, elle reconnaissait que ces évènements étaient à la fois un moment privilégié et intéressant, si l’on faisait abstraction des commérages évidemment.

Alleyne était d’autant plus ravie que ça lui permettrait de mettre en pleine lumière son renouveau en montrant à tous que les De Rayem, son frère y compris, n’avaient pas disparus, et qu’au contraire, ils étaient présents et prenaient les places qui leur incombaient sans faillir. Certes, ils n’aimaient pas cumuler les fonctions comme ce Brann Leckard le faisait. Mais que pouvait-on attendre d’une telle personne de toute façon ?! Alleyne n’avait d’ailleurs que peu apprécié la nomination de cette personne comme professeur de l’académie. Toutefois, elle avait accepté de faire confiance à Marinn et en son jugement. Il lui avait vaguement expliqué que sa nomination, à l’essai, n’avait été accepté que par souci d’égalité de traitement entre les élèves, pour leur permettre de choisir leur voie sciemment. Et en effet, Alleyne comprenait en partie. Elle savait également qu’interdire une chose ne faisait qu’accroitre l’intérêt que les élèves pouvaient avoir pour la chose en question. Or, il était impensable qu’ils les poussent vers la voie la plus sombre en leur interdisant l’accès à ce domaine de magie… aussi nuisible qu’il lui semblait. Elle ne voyait aucun avantage à la pratique de la magie noire dont la plupart des sortilèges bafouaient les règles mêmes de la vie et de l’ordre naturel.

Délaissant toutefois son raisonnement et ses préoccupations, elle comptait bien profiter de la soirée pour réaffirmer sa volonté de s’inscrire durablement à l’académie, mais également auprès des paladins que son bien aimé fiancé gérait. Elle se demandait aussi quelles seraient les personnes avec lesquelles elles parleraient, ou pas et avait déjà hâte de jauger les avis des uns e des autres sur certains sujets plus délicats. Au-delà de ces questions, ce bal était une fête en tant que telle et, après tout, qui n’aimait pas se divertir un peu après tout ce que la cité avait dû traverser ?

La seule ombre au tableau viendrait de son frère. Ou plutôt de celle qu’il avait choisi pour partager sa couche. Quitte à se choisir quelqu’un, il aurait pu faire l’effort de choisir une personne qui partageait leurs valeurs et leurs croyances, et qui, en cela, respectait au moins l’ordre naturel des choses. De plus cette jeune femme avait d’ores et déjà une réputation des plus sulfureuses ce qui la rendait encore plus douteuse et encore moins « bien » pour son frère qui avait visiblement tendance à s’enticher de n’importe quelle fille écartant les cuisses devant lui. En toute hypocrisie, Alleyne évidemment ne se mettait pas du  tout au même niveau que cette satanée sirène ou que sa sœur cadette. Une famille visiblement pourrie jusqu’à la moelle, bien que dans un genre tout à fait différent des Leckard ou des Bones.

Yearius avait été le choix d’Alleyne. Et elle ne l’avait jamais regretté pour le moment et doutait que ça puisse arriver un jour d’ailleurs. Quelle différence de prestige tout de même entre leurs deux choix. L’un incarnant le renouveau de la lumière et l’autre un des vices menant à la déchéance.
Elle avait promis à Marinn de faire un effort, toutefois elle bouillonnait déjà de rage à la simple idée de la voir accrochée à lui comme une sangsue. Mais une promesse en était une, malheureusement. Elle tenterait donc de faire bonne figure… et éviterait sans doute son frère pour avoir une chance de respecter sa parole.

D’ailleurs, le choix de sa robe avait été des plus compliqué. Elle avait été stupidement tiraillée entre sa jalousie maladive et l’envie de faire la meilleure impression au bras de Yearius. Ce qui signifiait une toilette impeccable : élégante, raffinée, sobre mais coquette, et qui à elle seule ne mettrait pas en doute l’intégrité de la celle qui la portait. Elle était après tout un professeur en plus d’être paladine. De seconde zone pour l’instant mais ça changerait bientôt. Elle se devait donc d’apporter la raffinement des De Rayem, leur lumière et leur loyauté. Elle aurait apprécié pouvoir montrer sa « force » avec une telle toilette mais en fin de compte, cette « tâche » revenait à Yearius à qui elle refusait de faire de l’ombre. D’ailleurs le pourrait-elle vraiment même si elle l’avait voulu ? Évidemment que non. Il s’agissait d’un ange après tout.


Le soir même, elle avait passé l’après midi à se préparer. Elle avait insisté pour le faire elle-même mais deux de ses amies n’en avait pas démordue et avaient fini par obtenir gain de cause, au moins pour l’aider à se vêtir et s’habiller sans manquer de déblatérer quelques rumeurs à propos de tel ou tel invité.

L’une de ses amies elle avait d’ailleurs cru déceler chez elle une différence, naissante, mais qui rendait la jeune femme encore plus étincelante que d’habitude. Toutefois, rien n’étant certain, Alleyne préféré mettre cela sur le compte de sa bonne humeur de sa joie à participer à un tel évènement. Et c’est avec un sourire contenu mais radieux qu’elle pénétra dans la salle du Trône au bras de son futur époux. Ensemble, ils vinrent rendre leurs hommages à la Reine et les membres les plus éminents de son gouvernement avant de se mêler aux invités. Elle avait repéré quelques personnes dont les visages lui disaient bien quelque chose, et d’autres dont les descriptions faites par ses amies ou d’autres connaissances.

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J'avais été la première à présenter mes hommages à Sa Majesté Luthièn. Mais il ne fallait pas attendre de moi que je fasse des courbettes et que je pose un genoux à terre. Je ne l'avais pas fait qouq le règne de terreur de Drake Leckard, alors même que j'obtenais un titre et des "terres". Il ne fallait pas s'attendre à ce que je le fasse avec un monarque moins dure que Luthièn et de toutes les façons, elle ne pouvait se risquer à m'en réclamer plus. Après tout, l'équilibre des forces actuels dépendait de ma bonne volonté et même si j'étais bien volontaire pour soutenir la stabilité politique de Targatt, je n'allais pas renier mes origines et l'autonomie qui allait avec.

Mais en saluant à la germaine la Reine, je ne pus m'empêcher de remarquer le regard de Saéline, le chambellan du Palais et conseillère de la Reine. En des temps où mon nom faisait rire ou n'attirait ni intérêt, ni sympathie à part celle de ceux qui sont mes plus proches alliés et fidèles, elle avait été mon professeur. Un professeur auquel je n'avais jamais vraiment parlé.Un professeur que je préférai garder à distance car bien trop agréable à mon goût et bien trop mus par de bons sentiments. Le genre de personne à la rhétorique et aux intentions qui peuvent faire basculer un homme ou une femme de bon côté. La nuance était que je n'en avais pas envie. Pas envie de mettre de côté l'ambition dévorante qui m'anime encore. Pas envie de voir disparaître sous le voile de la bonté, l'ordre, l'équilibre et la lumière le moteur de mes études, de mon ascension et de ma puissance. C'était grâce à l'ambition que j'étais ce que j'étais et c'était encore grâce à elle que j'allais rayonner à cette place.

Je n'avais aucun remord quant à ce qui avait pu se passer depuis presque deux ans. Le coup d'état de Drake, l'opération Sichern, la Guerre Civile, le massacre des anti-drake, l'assassinat d'Astoria Lane, tout ceci n'étaient que les moyens d'une fin que je présentais maintenant dans le plus grand des fastes à ce bal. Saéline était une bonne âme. Trop bonne pour moi. Trop bonne pour que je parvienne à obtenir ce que je voulais. Je l'ai donc évité hier et aujourd'hui, je devais constater la neutralité de ce visage où trônaient deux yeux pleins de tristesses. Les miens se durcirent, comme pour me protéger de ce qu'était Saéline. Exactement de la même façon que je l'avais éviter pendant mes années estudiantines à l'Académie.

Mais je ne m'attardais pas devant la Reine et son gouvernement. Ainsi je m'écartais et restait très légèrement en retrait, mais suffisamment proche pour observer le spectacle à venir. Après moi venait la fille de Saéline, la jeune Delphine Adelung. Constantza m'en avait parlé lors de nos longues conversations nocturne. En la voyant pour de vrai, je comprenais un peu pourquoi ma nièce semblait intéressée par cette jeune elfe. Petite, délicate, agréable à regarder. Elle avait de quoi être une sorte de pièce de porcelaine que l'on veut absolument dans la collection de ses proches pour mieux paraître. Je ne voyais pas plus pourquoi Constantza s'intéresserait à cette jeune elfe si ce n'était pour cela. A moins qu'elle ne s'en soit rapprocher par rapport à son nom ? Elle était une Adelung, le fille de Saéline. En tant que pupille de la Reine et en devenant l'amie de cette Delphine, elle pouvait s’immiscer un peu plus dans les méandres du pouvoir et devenir une source d'informations bien plus utiles qu'elle ne l'avait été jusqu'à maintenant. Il s'agissait maintenant d'espérer que j'avais vu juste.

Néanmoins, cette perspective fut remplacée par celle donnée par ma chère nièce quand elle fut enfin annoncée. Un fin sourire s'afficha sur mon visage en voyant à quel point elle resplendissait dans la robe que je lui avait choisis. Pour sur elle aurait préférer porter mon armure et moi sa robe. Cependant, en dépit de ma bonne conservation, après tout je n'avais que la trentaine, je ne pouvais plus jouer de mes attributs comme autrefois. D'une part en raison de ma position et de ma posture envers le Trône et Targatt que je ne cherchais plus à séduire, mais à garder en respect. D'autre part, parce que j'avais quelques vilaines cicatrices aux épaules et au cou datant des mauvaises heures de la prise de pouvoir de Drake qui ont compromis la beauté d'une partie de mon corps musclé de Germaine. Il revenait à ma nièce de remplir ce rôle maintenant. Elle le devait d'autant plus qu'en tant qu'héritière présomptive de la Vice-Royauté, elle devait se trouver des alliés dès à présent en Targatt, comme moi en mon temps, pour sécuriser son règne sur Arakis et Melghir. La séduction restait une arme non négligeable et de toute évidence, au vu de sa démarche et de sa maîtrise, Constantza savait déjà bien y faire. Je n'avais donc plus à m'inquiéter de cela et je pouvais simplement me réjouir de voir les regards la suivre et la fixé. La mise en scène marchait comme je le pensais si bien que je me permis de féliciter ma nièce pour sa prestance et son charme non négligeable. Elle était néanmoins ailleurs. En soit cela m'importait peu. Elle pouvait profiter de sa soirée. J'espérais toutefois qu'elle se rappelle qu'elle portait l'image attirante des cités dont elle allait hériter et qu'elle ne causerait pas de tort à cette image.

Les autres convives suivirent sans grand intérêt pour moi. Des hommes portant à leur bras quelques bijoux de chairs et des femmes sans grandes utilités. Evidemment, certaines personnes attirèrent mon attention, en bien comme en mal.

Ainsi Damian Stroke, après avoir rendu ses hommages, vint pour me parler, en attendant la suite des réjouissances. Il était plutôt directe d'engager la discussion avant même que Sa Majesté ne fasse un éventuel discours et même avant que le son de la musique ne couvre les conversation.

"Sénateur Stroke, je pense que nous devrions repousser cette discussion à plus tard. A un moment où les oreilles des murs écouteront plus la musique que notre conversation."

Je souriais au sénateur avant, évidement, de lui présenter Constantza et de revenir aux invités qui suivaient.

Brann Leckard et Ambre Heasley à son bras. Un couple surprenant, mais qui montrait bien l'intention du nouveau maître de la famille Leckard de retrouver son prestige. Ils étaient suivis de Alleyne De Rayem et Yearius Clippeum. Mon regard s'assombrit, au point qu'il fallut l'intervention de Constantza pour éviter que je ne me fasse remarquer. Lui aussi m'avait remarqué et je n'avais pas l'intention de cacher mon inimitié pour lui et ce qu'il représentait, c'est à dire une menace. Même si le massacre des De Rayem restait regrettable, l'ordre qu'ils animaient été une entrave à l'ordre de la cité. Ils suivaient leur propre code, leur propre doctrine et leur propre discipline. Un ordre religieux qui ne répondait qu'à lui même et n'était responsable ni devant la loi, ni devant le Roi. Maintenant, il reconstituait cet ordre et essayait de trouver des appuis dans la boue et les taudis que j'avais arpenté plus jeune. Je devrais donc le supporter lui et la poupée De Rayem qui l'accompagnait et qui devait renforcer son aura auprès de l'ordre renaissant. Et bien soit, il ne restait plus qu'à rester loin d'eux.

Evidemment, si la fille De Rayem était là, le frère ne devait pas être loin et Marinn De Rayem suivit. Lui qui s'était targué de ne pas chercher vengeance et de rester loin de tous les mouvements politique du royaume me fit sourire. Non pas pour lui faire bonne impression, mais parce qu'il m'amusait. Il venait, une fois de plus d'entrer dans une arène politique. Et pour ne rien arranger à sa neutralité, il avait comme cavalière une Vertdragon. Avait-il oublié qu'Hésandre était parmi les royaumes les plus opposé à la magie et que l'Ordalie, leur ordre inquisitorial, se renforçait chaque jour. Lui ne devait en savoir depuis sa tour d'ivoire. Mais j'en savais quelque chose à Arakis et De Rayem, porte d'entrée de Targatt et ou tous les jours, les hommes de la Garde rejetaient aux frontières ces chasseurs de mages. Ainsi, le directeur de l'Académie se présentait au bal avec la naïveté d'être en dehors du jeu politique tout en mettant le resceptacle de toutes les appréhensions de ceux qui s'interrogent sur la cohabitation entre Targatt et Hésandre. Cette soirée, autours de Marinn De Rayem, risquait d'être fort intéressante, pour sur.

Après Luna Langevin auquel je ne lançais qu'un simple regard, il ne manquerait plus que je souris à la tenancière d'une maison de plaisir, quand bien même j'en fus une cliente dans mes années de services dans la Garde Royale, vint Alecto et son épouse. Je lançais un sourire entendu à Alecto Leckard. Après tout, je restais celle qui avait permis à son neveu de trouver asile et maintenant d'être hors de porté des griffes du Trône. Une conversation quant à cela s'imposait d'ailleurs. Les conditions fixées par la Reine quant au retour de Cain devait lui être transmises et il en allait de même des avantages réciproques quant à notre coopération. Même si j'avais aider Cain gracieusement, je me devais d'assurer mes arrières.

Après cela, les derniers invités entrèrent et la Reine fit son discours avant d'ouvrir le bal. La première danse était toujours un moment difficile, quelle que soit la culture, car elle donnait le ton de la soirée et surtout, donnait une image du souverain. Et cette image, Sa Majesté l'avait soignée. Mes yeux ne la lâchèrent pas. Cela aurait certainement irrité mon époux resté à Melghir. Mais il n'était pas là donc je restais libre de suivre du regard la Reine et m'émerveiller devant sa robe qui avait changé de couleur. Une robe changeante et tout en nuance. Une sobriété apparente qui couvrait le caractère flamboyant de la Reine. Un avertissement ou une présentation d'elle-même ? Les deux pouvaient coller. La Reine restait calme dans la plupart des situations et même sous le coup des menaces, ne se laissait pas emporter. Je l'avais bien vu. Mais tout ceci pourrait-il cacher une furie digne de Korda ? Une colère intérieur qu'elle pourrait mettre en oeuvre dans les moments les plus mouvementés et complexe, autant que cette danse ? Tout ceci était bien réfléchis et je me devais  d'en prendre bien note. Il y avait dans l'exécution une finesse qui ne se retrouvait pas dans ma mise en scène. La différence des cultures évidemment. Les Germains sont directes, francs et même quand ils mettent en oeuvre des stratagèmes, leur simplicité assurent bien souvent leur succès. Les elfes jouaient sur un autre tableau.

Cela n'empêchait pas le fait qu'il y est une tache au milieu de celui-ci : le barde avec lequel dansait la Reine. Targatt restait une ville très majoritairement humaine et le petit peuple, dont elle était la représentante suprême désormais, n'avait qu'une place périphérique. Il aurait été de bon goût qu'elle prenne un cavalier humain et non elfe, qui plus est Haut-elfe, pour assurer son impartialité aux autres membres de la haute société targatienne. Ce choix, aussi flamboyant et fin soit-il, n'en restait pas moins dangereux sur le plan politique et certaines personnes, notamment les représentants des guildes d'artisans, en concurrence avec les habiles elfes et autres nains, pourraient mal le prendre. J'espérais bien que quelqu'un le lui dise après coup. Il serait malvenu de ma part que je le fasse. Elle pourrait le prendre comme une menace et non un conseil.

La danse de la Reine fut suivit d'un ballet. Ennuyant, voilà comment je devais le qualifier. Constantza semblait apprécier, ce qui était surprenant vu qu'elle n'avait jamais appris à dansé ou demandé à mon cher cousin, son père, à apprendre. Mais qu'importait. Les cabrioles des danseuses ne intéressaient guère. Les couleurs me rappelaient bien Arakis, Melghir et Targatt, mais je ne me sentais toujours pas emporté par cette chorégraphie lourde et bien trop chargée à mon goût. Par respect je regardais. Du moins, j'en donnais l'impression, car je scrutais du regard les autres convives jusqu'à ce que les danseuses invitent les convives à danser sur une musique plus sobre.

Il fallait régler la question de Cain au plus tôt et j'avais toujours le sénateur Stroke avec qui m'entretenir. Ainsi, pour éviter de voler Alecto à son épouse pour leur première danse au bal, j'allais devoir me tourner vers le Sénateur Stroke. Mais certainement pas en dansant. Déjà que me faire voir en sa compagnie pourrait soulever des tensions car on pourrait me soupçonner de m'insérer dans la vie politique de Targatt, il ne manquerait plus que je donne l'impression de vouloir bien m'entendre avec lui en lui offrant ma première danse du bal.

J'allais donc simplement éviter la première danse et attendre qu'il me rejoigne. Ce serait plus sûr sur le plan politique. Ce qui l'était tout autant était que Constantza trouve un cavalier pour la première danse. Ou une cavalière. Cela n'était pas interdit chez les Germains et l'était en Hésandre. Qu'en était-il en Targatt ? Bonne question. Je n'en avais pas la réponse. Enfin, il valait mieux qu'elle ne soit pas trop collée à moi, aussi bien pour qu'elle puisse profiter que pour se faire voir elle et sa longue crinière émeraude, signature de son appartenance à ma dynastie.

Voir Delphine avait été rassurant. Je n'allais pas être la seule jeune fille de la soirée. Mieux encore, la seule jeune fille de l'Académie. Je devais admettre qu'elle devais être bien plus âgée que moi. Mais en tout cas, elle avait une mentalité proche de la mienne, enfin d'une jeune fille de seize ans en tout cas. Cela me rassurait car au moins je saurais avec qui passer le reste de ma soirée quand j'en aurai eu assez de discuter avec les personnes qui souhaiterai s'entretenir avec ma tante.

Elle semblait d'ailleurs satisfaites de l'impression que j'avais pu faire, et que je faisais toujours. Je lui avais lancé un simple regard tandis qu'elle m'avait souris, un sourire de satisfaction, un sourire que l'on fait quand on est fier de soit et de ses créations. Cela m'avait arraché un soupire. Je savais bien que j'étais dans la place pas seulement pour me former à la magie, mais aussi pour lui donner les informations qu'elle espérait. Cela m'ennuyait un peu cas je trouvais cette attitude déshonorante pour une Germaine. Mais Wilhelmine ne l'était plus totalement le jour où elle avait du fuir avec sa mère et son père le Bastion puis les provinces germaniques. Elle s'était adaptée à son environnement et cela l'avait réussi. Comme je l'avais fait il y a une dizaine d'années. Sans pour autant suivre son exemple à la lettre, je comprenais que je devais savoir charmer et inspirer le respect pour réussir. J'étais encore trop jeune pour inspirer quoi que ce soit d'autre que la sympathie de la part des adultes. Alors je devais jouer ce sur quoi j'avais à ma disposition : mon charme. L'idée me fit soupirer de nouveau ce qui ne manqua pas d'attirer l'attention de ma tante.

Elle avait bien vu que tout cela me faisait réfléchir et que j'avais l'esprit ailleurs. Mais se doutait-elle du pourquoi ? Non je ne pensais pas. Elle était intelligente, pas praticienne de la magie spirituelle. D'ailleurs, elle ne me dit rien et retourna à la contemplation des invités. Moi, je cherchais si d'autres camarades de l'Académie étaient là. après tout, au delà de notre familiarité du fait de nos études, ils étaient aussi le futur de Targatt et par conséquent, il m'appartenait, si on suivait la logique que j'avais finis par accepté de ma tante, que j'entretienne de bonnes relation avec eux. Je pu ainsi retrouver du regard Delphine avant qu'un jeune homme ne vienne saluer ma tante. Le sénateur Stroke ? Je n'avais entendu parlé de lui que de nom et le salua simplement quand ma tante me présenta avant qu'elle ne l'invite à le revoir plus tard. Elle était déjà à manigancer ? Ne pouvait-elle donc pas s'en empêcher ? Était-ce dans le sang de sa branche de la famille pour qu'elle agisse comme ça avec autant d'aisance ? Qu'importait. Tant qu'elle ne m'impliquait pas outre mesure, je pouvais espérais passer entre les mailles du filet. Un filet qui était tenu par la Reine, ma tutrice que je n'avais pas vu depuis la fin de la guerre. Chose qui ne manquait pas d'agacer ma tante d'ailleurs.

En observant les invités, je fus bien obligé de rappeler à l'ordre ma tante dont l'aura devenait beaucoup trop voyante à mon goût. Elle avait commencé à s'énervée en voyant Yearius Clippeum, le jeune paladin. Je n'avais d'autres avis sur lui que ce que ma tante m'avait dis. Et il m'indifférait en réalité. Tant qu'il pouvait rester loin de moi ou de ma famille, cela m'arrangeait. Puis vint Harmony à qui je lançais un léger sourire En même tant que ma tante d'ailleurs. Pourquoi souriait-elle ? Elle n'appréciait ni Harmony à cause de son nom, ni Marinn à cause de sa généalogie. Elle devait encore réfléchir, encore et toujours. Je me demandais vraiment si j'étais de la sorte moi aussi, à réfléchir sur tout, à tout calculer à l'avance, à tout envisager pour être sur que tout se passe bien. Je ne savais pas vraiment. A l'époque où je portais plus la plume que l'armure, je travaillais simplement. Quand j'ai passé l'armure, j'ai certainement aiguisé mes sens et ma notion du combat et avec ma formation à la guerre, je pense avoir aussi pris ce trait de préparation. Mais cela se voyait-il autant que chez ma tante ? Je ne savais pas.

Et de toutes les manières, mon esprit fut happer par quelque chose de bien plus intéressant. Après le discours de la Reine, elle s'illumina et commença à danser puis d'autres elfes vinrent faire un long beau ballet. J'étais admirative face à la grâce de ces êtres si mystérieux. Ils bougeaient avec tant de souplesse, de précision et de beauté. Leur corps évoluait comme une plume se faisant bercer par une légère brise pendant sa chute. Les danseurs ne s'imposaient pas au monde, ils l'épousaient, s'insinuait dans l'oeil attentif pour y laisser apparaître quelque schéma apaisant et grandiose par la multitude des mouvements qu'ils opéraient. Quel dommage que la danse ne me soit interdit. Non pas par ordre, mais en raison de ma jambe. Elle était précise, tout aussi précise qu'une vraie jambe. Cependant, les mouvements qu'une danse imposait, la concentration pour être en rythme et pouvoir éventuellement discuter avec mon partenaire dépassait mes compétences en télékinésie. Par erreur, je risquais de casser une partie du mécanisme interne et alors ce serait un fiasco.

Je préférais donc éclipser, comme ma tante, quand les danseuses invitèrent les convives à danser. Longeant les murs, je finis par trouver la table où Delphine s'était réfugiée. Elle aussi ne voulait pas danser ? C'était dommage, elle pourrait pourtant être magnifique sur la piste de danse. J'allais m’asseoir en face d'elle quand je compris qu'elle ne m'avais pas remarqué, trop intéressée par son livre. Alors je décidais d'aller juste derrière elle et lire au dessus de son épaule avant de l’interpeller.

"Et moi qui pensais avoir ton attention après la façon dont tu m'as dénudé du regard tout à l'heure, je ne pensais pas être en compétition avec une telle aventure."

Je souriais, satisfaite de ma boutade avant de m’asseoir sur la chaise à côté d'elle.

"Tu ne danses pas Delphine ?"

toc toc, c'est moi !

A peine le dernier convive avait-il franchis le cercle de vérité et rejoint l'assemblée qu'un léger malaise s'installa. Ho bien sûr, peu le remarquèrent car après tout, qui prêterait une attention excessive à une bise aussi infime que le souffle d'un nourrisson ? À la différence de luminosité entre le zénith et l'heure qui suit ? D'autant plus lorsque son attention se porte sur les différents convives.
Après tout, qui remarquerait, dans l’entrelacs des pas effectués par chaque déplacement d'une personne, que les pétales et les fleurs qui jonchent le sol se meuvent d'eux même de manière presqu'infime ?
Pour autant, l'instinct aiguisé saurait sentir l'indéfinissable...mais la raison murmurerait qu'il ne peut s'agir que d'une impression dû à un surcroît de méfiance engendré par les rudes événements qui avaient précédé la paix nouvelle car après tout, rien d'inditenfiable n'était perceptible ...

Puis la Reine s'était levée et avait annoncé l'ouverture des réjouissances, ouvrant elle-même le bal. Le malaise ne s'était pas tût, mais l'attention portée à cet être gracieux et les messages politiques de chaque geste et regard, les siens comme ceux des convives, n'étaient-ils pas plus importants que ce probable trois fois rien ?
Mais la donne changea lorsque Luthien Nylaathria fit usage de magie pour changer de tenue. Le malaise devint perceptible à toute personne capable de magie sans pour autant pouvoir le définir... l'observateur aguerris lui, peut être, pourrait remarquer que la danse éternelle des flammes des torches et chandelles était influencée par un peu plus que le chaos naturel qui les rendaient d'ordinaire hypnotisant. Les chandelles des tablées semblaient aspiraient vers le centre de la pièce par saccade, tandis que les torches des murs suivaient un sens contraire... Au delà du désordre au sol dans le tapis florale provoqué par la première danse royale, un espace concentrique clairsemé commençait à se deviner ...

Son altesse revint s'installer sur son trône, laissant la place à trois danseuses qui, après démonstration de leur talent dans une chorégraphie pleine de sens, vinrent invités l'assemblée à participer au ballet. Le malaise devint, à cet instant, clairement distinct. Plus qu'un malaise, quelque chose était à l’œuvre, toute personne avec suffisamment de maîtrise y prêtant attention pouvait sentir la magie palpiter faibrillement dans l'air ambiant. Les premiers pas de danses de l'assemblée s'accompagnèrent du mouvement concentriques des fleurs qui dansèrent avec eux, donnant une impression féerique à la scène alors que les flammes des différents points de lumière s'étiraient et se rétractaient en rythme, se mélangeant naturellement à la mélodie dans un ballet de harmonieux de son et lumière....puis tout se calma brusquement. Les fleurs retombant délicatement dans un mouvement de balancier jusqu'à toucher le sol, le malaise se dissipant, laissant un vide inquiétant, le genre d'impression dévorante qui vous dicte clairement que la situation est anormale...

La poussière générée par le monde présent se mut en serpentant au sol dans un silence de plomb jusqu'à se réunir au centre clairsemé où elle dessina le schéma complexe d'un cercle de magie très élaboré fait de multiples cercles et de symboles indéchiffrables reliés entre eux par des vercteurs aux lignes élégantes.
Des vents violents prirent alors naissance au centre de tout de manière brutale, expulsant sans ménagement toute personne du cercle de magie alors que le périmètre qu'ils couvraient s'amplifiait jusqu'à atteindre les rebords du cercle. L'ensemble des convives purent alors sentir clairement leur magie se faire ponctionner sans pouvoir contrer la chose tandis que les vents s'épaissirent et devinrent opaques, tel de gros nuages noirs d'orage dansant en cercle de manière anarchique. Toute magie à l’œuvre vint participer à renforcer le sortilège en cours ....
A mesure que les secondes passaient, des sons, d'abord flous et lointains, devinrent se plus en plus perceptibles. Bruits de chocs de l'acier contre l'acier auxquels vinrent se mêler la cacophonie des râles de fureur et des cris d'agonie...

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Yahn et Caïn se jetèrent un dernier regard entendu tandis qu'ils psalmodièrent les dernières phrases de leur sortilège. Les doigts de l'Ishaldi ne cessant de s'agitant pour dessiner des formes runiques dans l'air autours de lui, répercutant les traits dans le schéma magique complexe au sol; épaississant le vortex et occultant la présence de son acolyte à sa vue. Pourtant il le savait toujours présent car la forme d'incarnation élémentaire qu'ils revêtissaient les connectait entre eux. Il eut un léger regret en sentant la vie de Kyara s’éteindre mais il savait parfaitement que cela allait arriver, tout comme il savait la nécessité de ce sacrifice.
Les contours du cercles et les lignes compliqués qui dessinaient son schéma se mirent à luir, coupant soudainement Yahn de sa connexion à Caïn sans pour autant lui ôter la forme qu'il revêtait. Son partenaire était-il toujours du voyage ? Voyageaient-ils seulement ? Peut être avaient-il finalement étaient contrés et Caïn abattu ... non, il n'y avait aucune logique à cela, tout puissante soit-elle, Ruin n'aurait pas pu mettre fin à tout cela aussi rapidement, encore moins avec la marée d'adversaire la séparant d'eux. Il était en route, il devait être en route, le contraire n'était pas même envisageable. Alors ses sens lui firent défaut.
Il sentit lentement ses oreilles se rendre sourdes au vacarme ambiant jusqu'à ce qu'un acouphène strident vint résonner dans son crâne, le harcelant de son son aiguë. Sa vue se troubla, les formes et couleurs se mirent à danser devant ses yeux, incapable de fixer leur point de focal ; il sentit le vertige le prendre et la nausée monter, le forçant à mettre un genoux à terre, il maintien son appui de sa main opposée ancrée au sol, les doigts crispés tel un félin à l'écorce d'un arbre.
Une violente douleur vint le transpercer de l'intérieur, lui arrachant un cri de douleur auquel la colère vint répondre dans un hurlement qui lui sembla durer une éternité …

Puis la douleur s'éclipsa aussi brutalement qu'elle était apparue. L'acouphène se dissipa doucement tandis qu'il sentit que la nature du sol sous sa main n'était plus la terre meuble sur laquelle il se tenait. Le flou de sa vision se fit plus net et il comprit que le voyage était accompli. Se sentant suffisamment maître de lui, il se releva doucement, remarquant que le vortex était toujours à l’œuvre et qu'il absorbait le manteau d'ombre dont l'Ishaldi était drapé.
Cette forme d'incarnation élémentaire devait probablement continuer à maintenir un lien avec son point de départ...conserver cette forme pouvait se révéler dangereux, tant pour lui que pour le risque que représente le fait de laisser un piste que le démon pourrait remonter …

Yahn mit fin à cette forme et aussitôt, le cercle cessa d'irradier et le vortex se dissipa de lui-même, se résorbant de manière éparse. Dans les premiers interstices offerts par la dissipation de l'opacité, il put observer la présence de nombreuses personnes autours de lui ; ce qui était logique vu les forces colossales qui avaient été nécessaire à la réalisation sur sort, son point d'arrivée devait forcément être une forte concentration de potentiel magique en un même lieu.
Les nuages s'étaient à présent parfaitement dispersés, révélant l'homme dans sa tenue de guerre déchirée et maculée de tâches de sang ; les pièces métalliques de ses avant-bras et de ses grèves identifiables à travers les trous de son grand manteau noir en piteux état. Yahn jeta immédiatement un œil expert sur les éléments qui constituaient la scène dans laquelle il venait de faire irruption :
Une grande salle richement décorée, deux larges tables de victuailles, de nombreux convives élégamment habillés, plusieurs gardes à des points stratégiques, une estrade d'honneur avec des sièges qualifiant l'importance de leurs occupants et un trône au centre d'eux.

Nul doute qu'il venait de perturber quelques festivités en présence de personnalités de haut rang et probablement même du plus haut dignitaire de la zone où il a atterrit..dans un instant, les gardes allaient probablement se remettre des effets de la perturbation magique qu'il avait dû engendrer et  réagir, rendant la situation encore plus complexe ; il lui fallait agir en premier.

Il se pivota sur lui-même pour faire face à l'occupante du trône, plaçant sa main gauche sur le pommeau de son épée et sa main droite à plat sur sa poitrine au niveau du cœur. Ces gestes étaient signes de paix et de respect, du moins d'après ses habitudes...était-ce le cas ici ?
Il se hasarda à une prise de parole pour assurer de son pacifisme et éviter toute hostilité tout en restant en alerte, prêt à réagir à tout acte hostile.

" Dhekih lêneksha Yahn Wards lê' dhekih yeahyënshe nelshalê kiüh rüksha ëlshaülnelê. Ëlshaülnelê rhiël dhekih nelüketh'kisha.
Kiüh rhiêl rhiälsha, dhekih laülsha nelshalê rhilê. Rhiël lhâyehlê  rüksha lê' dh'kiüh rhiälrhieth."

Le bal

Trop occupée à parader fièrement au bras de son cavalier, Ambre n'était aucunement concentrée ni sur l'atmosphère ni sur les légères anomalies pourtant présentes et si infimement perceptibles. Elle jetait des coups d'oeil partout mais ces derniers n'étaient certes pas conditionnés par une sensation quelconque à laquelle elle aurait souhaité avoir une réponse. Non, elle observait simplement les autres convives, à la recherche de l'une ou l'autre de ses rares amies, et en profitait pour adresser des sourires aussi charmants que polis à ceux dont elle croisait le regard. La plupart de ces derniers le lui rendaient de la même manière mais on pouvait si clairement lire l'étonnement et un brin d'inquiétude sur leurs visages qu'elle ne put s'empêcher de lâcher un petit gloussement amusé. C'était ça ou se contenter de rougir affreusement... Heureusement, seul Brann fut témoin de son petit pouffement. Certes ce n'était pas une manière de "Dame", et encore moins celle d'une future matriarche, mais elle n'en avait cure. Pour l'instant elle savourait pleinement la présence de la personne dont elle était éprise et se moquait éperdument de tout ce que les mauvaises langues pouvaient dire sur leurs comptes.

Après le discours de sa majesté, la Reine gratifia l'assemblée d'une danse et d'un ballet des plus gracieux et sophistiqué. Ambre n'en avait après tout jamais vu et elle tombait dénue devant tant de grâce. Les mouvements étaient si précis et si fluides qu'elle finissait par avoir l'impression d'être hypnotisée. En revanche, l'aspect politique lui échappa en bonne partie. Il faut dire qu'elle ne cherchait pas particulièrement à trouver un sens à cela, de peur de tout gâcher.

Enfin, les danseurs invitèrent les convives à se occuper l'espace à leur tour pour la première danse. Ambre n'était pas la meilleure des danseuses mais elle comptait bien profiter des leçons forcées de sa mère en les mettant en pratique. Ainsi, sans vraiment prendre le temps de voir si son cavalier allait l'inviter, elle l'entraina à sa suite par le bras jusqu'à la piste de danse. Absorbé par la danse et surtout par le regard de son partenaire, elle s'interrompit brutalement alors qu'un cercle magique se formait sur le sol de la salle de bal.

Machinalement, elle s'en écarta en repoussant doucement Brann également.

"Ecartez-vous !" cria-t-elle à l'ensemble des présents bien qu'elle doute que sa petite voix suffise par être entendue par tous compte tenu du brouhaha, et encore moins écoutée par ceux qui l'auraient entendu.

Elle n'y avait même pas pensé, ça avait été un réflexe sans douté causé par sa profession comme par les sentiments qu'elle avait pour lui. Elle jeta un rapide coup d’œil aux membres du gouvernement pour s'assurer que ce cercle était le fruit de l'un d'eux ou du moins qu'il était prévu. Mais leur mine tantôt surprises, tantôt tendues l'avertirent que ce n'était pas le cas.

Des vents de plus en plus violents prirent forme au point de repousser certains invités. Alors qu'elle songeait à envelopper l'étrange cercle dans un bouclier pour le contenir, elle sentit sa magie se faire absorber. Un frisson de terreur la saisit devant cette sensation inédite pour elle. Fort heureusement, sa raison restait valide. Elle tendit le bras dans le but évident de lancer un sortilège mais rien ne se produisit et elle sentait sa magie fondre comme neige au soleil. N'y avait-il donc pas un abjurateur dans toute la masse de mages puissants ? Lui parviendrait sans doute à contourner ce phénomène qui semblait prendre encore de l'ampleur puisque les vents semblèrent se transformer en une masse brumeuse et informe des plus sombre. Un vortex apparut.

Progressivement, des sons lui parvinrent. D'abord indistincts, elle finit par discerner des bruits de batailles... et des vies fauchées trop tôt. on sang mais qu'était-il en train de se passer ? Elle jeta un coup vers Brann pour se rassurer avant de se reconcentrer. Sa raison lui rappela qu'il était inutile de paniquer avant de savoir ce qui arrivait. Car il était clair maintenant que quelque chose approchait. Une chose sombre à en juger par ce qui émanait du cercle comme par le sort à l’œuvre.
Elle était protectrice, elle agirait donc en tant que telle.

Ambre crut discerner un cri plus distinctement que les autres mais n'était sure de rien. Comment aurait-elle pu l'être dans ces circonstances ? Et un seul mot résonnait dans son esprit : démon. Après tout, l'un d'entre eux avait échappé à l'éradication et ce n'était pas le plus faible... Se pouvait-il qu'il tente quelque chose d'aussi... gros ? Compte tenu de leur dernière tentative, elle jugeait le risque élevé. Et tendis qu'elle sentait sa magie se stabiliser, elle se prépara à faire face à ce qui en ressortirait.

Une créature d'ombre sembla changer de forme pour en adopter une plus humaine. A moins qu'il soit humain mais pour l'instant, il était impossible pour elle de le déterminer pleinement. Dans le doute, elle préférait donc le considérer comme un ennemi potentiel. D'autant plus que les démons avaient l'habitude d'utiliser des mortels dans leurs desseins.

Lorsqu'il se tourna vers la reine en posant une main sur le pommeau de son arme, elle n'attendit pas davantage. Des grésillements se firent entendre tendis qu'elle venait de faire apparaitre l'arc d'électricité qu'elle utilisait habituellement. La seconde suivante, l'éclair qui lui tenait lieu de flèche fut décochée, filant droit vers la cuisse de l'inconnu. Elle ignorait si ça aurait un quelconque effet puisqu'elle ne savait rien de cette créature mais si l'éclair atteignait sa cible, elle serait paralysée quelques minutes, ce qui devrait drastiquement réduire le danger qu'elle représentait.

Ce faisant, on pouvait croire qu'elle agissait sur un coup de tête mais toutes les personnes qui avaient eu à combattre récemment connaissaient l'importance d'avoir l'initiative. Ambre bien qu'encore très jeune avait appris la leçon durement. Par ailleurs, elle n'attentait pas à ses jours puisqu'elle ne visait pas un point potentiellement vital. De plus, certains sorciers n'avaient nullement besoin de prononcer des incantations ou de s'appuyer sur des gestes pour lancer un sortilège, et il s'était délibérément tourné vers la Reine. Que ça soit pour parler ou pour attaquer, Ambre préférait appliquer le principe de précaution. Elle ne pouvait décemment pas laisser la Reine courir le moindre risque... bien qu'à la réflexion, elle avait sans doute déjà sa garde personnelle sur le coup... Tant pis, de toute façon la flèche avait été décochée...

Pour compléter le tout, elle songeait que si sa flèche ne l'atteignait pas, ça permettrait quand même de mieux cerner l'inconnu. Il serait forcé de révéler ses capacités pour parer ou pour esquiver. Autant de choses qui donneraient de précieuses indications sur ce qu'il était et quel était son but en faisant ainsi irruption dans la salle du Trône devant autant de monde. Il fallait être fou... ou inconscient... ou stupide.

Le bal royal

Alleyne profitait de ce début de soirée, trop heureuse de retrouver le "beau monde". Après tout, elle avait beau rester humble et ne pas faire grand cas des différences de statuts sociaux entre individus, traitant tout le monde de la même manière, elle devait admettre qu'il était plaisant parfois de se retrouver avec des personnes qui jouaient toutes avec les mêmes codes. Ça avait quelque chose d'à la fois gratifiant et de reposant.

En tout cas elle était ravie de passer ce moment privilégié avec l'être aimé. Les êtres aimés si on y incluait Marinn, bien que son enthousiasme soit entaché de ce côté là par le simple fait qu'il soit accompagné d'une greluche comme Harmony. Toutefois elle avait promis aux deux hommes de sa vie de faire un effort avec cette dernière qu'elle regarda passer d'un air froid mais neutre. Du moins aussi neutre que possible. Par la suite, Alleyne prit un malin plaisir à esquiver si l'on pouvait dire, Marinn. Si il voulait venir lui parler, il le ferait sans cette chose à son bras. Alleyne se sentait presque insultée en fait qu'il puisse choisir une personne comme elle pour disons... la remplacer. Au moins de son côté elle avait placé la barre assez haut ! Un demi ange, paladin, adorable, séduisant et qui avait le courage d'agir selon ses convictions qui plus est. Que demander de plus ? Enfin quoi qu'il en soit, elle était ravie des marques d'affection de Yearius qu'elle lui rendait, les yeux pétillants de bonheur. Après tout, c'était lui son futur.

Ils se mirent finalement à danser jusqu'à ce qu'une impression écrasante et malsaine n'envahisse la salle et, pire encore, que les énergies magiques ne soient drainées. Et pas qu'un peu ! Alleyne sentait son énergie s'évaporer à une vitesse assez incroyable. Et ses tentative pour les protéger, Yearius et elle au moins, restèrent vaines.
Heureusement, la phénomène s'arrêta et une forme apparut, rapidement... attaquée par Brann Leckard et sa nouvelle conquête. Elle n'en fut pas étonnée, il était communément admis que les Leckard étaient des plus vindicatifs. Qu'il se soit acoquiner avec une personne ayant la même propension à agir avant de réfléchir était cohérent. Toutefois, elle était davantage concentrée sur l'individu qui avait pris forme maintenant que le portail, ou vortex, s'était dissipé.

Yearius, par précaution avait déployé ses ailes et s'en servait de bouclier. Alleyne de son côté ayant retrouvé son sang-froid se contenta de joindre les mains un peu à la manière d'un prêtre bien qu'elle ne soit aucunement une, afin de se parer, ainsi que toutes les personnes à proximité, d'un halo divin. Ce n'était pas grand chose mais ça permettrait de renforcer les compétences et la résistance de ces derniers si jamais un combat devait s'engager avec l'inconnu.

Je regardais distraitement Damian approcher Wilhelmine. Je ne parvins pas à déterminer ce qu'elle pensais de lui. Certes elle avait servi Drake mais maintenant qu'elle avait ses propres cités je n'était pas certain qu'elle considère de la même manière ses anciens alliés. La nouvelle relation qu'elle pouvait établir avec les Leckard et les anciens proches de Drake était encore à déterminer. Elle pouvait très bien chercher à adoucir sa réputation en évitant de s'afficher aux côtés de notre famille, ou bien faire de nous ses alliés tout en profitant de notre faiblesse actuelle. Le sourire qu'elle m'adressa me fit pencher pour la deuxième option, même si à ce moment là, j'ignorais encore qu'elle avait aidé mon neveu Caïn à se tirer de la mauvaise passe où il s'était fourré. Je lui rendis cordialement son sourire mais ne me pressait pas pour autant autour d'elle comme d'autres convives. Après tout la soirée ne faisait que commencer.

Le lancement du bal fut plutôt distrayant . Un peu tarabiscoté, mais cela n'avait rien d'étonnant venant d'une elfe. Il y avait aussi de la magie dans l'air, je crus dans un premier temps que cela faisait partie du spectacle. J'entamais naturellement la première danse avec Sofia, heureux de passer ce moment avec elle. Je compris que quelque chose clochait quand la magie que l'on sentait jusque là disparut d'un seul coup, comme le calme avant la tempête. Voyant les glyphes se former sous mes pieds, je lançais un regard inquiet à Sofia alors que quelqu'un criait un avertissement. Mais avant que je puisse esquisser un geste nous fûmes projetés en dehors du cercle qui venait d'apparaître autour de nous par une violente bourrasque élémentaire. La magie ne me fut d'aucun secours, l'atterrissage fut rude et j'entendis ma clavicule droite se briser. J'avais connu pire. Je me relevais et reculais avec Sofia, mais restais fasciné par le phénomène comme un papillon devant une flamme. Je connaissais maintenant assez les démons pour sentir qu'il y en avait un de l'autre côté, sans compter l'incroyable quantité d'énergie négative qui circulait de l'autre côté. Cela aurait pu être une dernière tentative démoniaque, mais l'impressionnant sortilège laissa finalement place à un homme, un simple humain, en apparence du moins.

Je laissais à d'autres l'initiative d'apprendre à l'intrus les règles de la politesse. Je ressoudais mes os en quelques battements de cils et posais la main sur l'épaule de Sofia. Il aurait été un peu prétentieux de ma part de vouloir la défendre, elle savait se débrouiller mais étant donné son tempérament, je préférais la dissuader de se lancer de manière inconsidérée dans la bataille. J'avais déjà assez donné pour défendre ce trône et je ne voulais pas qu'elle prenne des risques pour un combat qui n'était pas le nôtre.

La reine ignorait encore quel avait été l'effet de sa prestation, elle savait bien qu'il était de toute façon impossible de plaire à tout le monde, et ce n'était d'ailleurs pas le but. Mais les événements ne lui donnèrent pas la possibilité d'observer les réactions du public. Elle surveillait les moindres détails de l'organisation et elle avait fini par remarquer comme d'autres ce qui était en train de se produire. Elle avait rapidement compris qu'il s'agissait d'un portail. Son premier réflexe fut donc d'activer les boucliers du trône et de lancer un contre sort appuyée de sa garde. Cela ne fut pas suffisant pour stopper le sort mais atténua en partie la déflagration élémentaire qui ne fit que des dégâts légers. Un tel portail demandait tellement d'énergie qu'une fois lancé il était difficile de stopper le processus, ce qui le rendait d'ailleurs potentiellement dangereux. Heureusement le lanceur de sort n'avait créé qu'une brèche temporaire et n'avait pas cherché à maintenir un portail stable, ce qui aurait été une autre affaire.

Le sort se termina rapidement et la tempête laissa place à un individu. S'il s'agissait d'une attaque, l'intrus avait sans doute mal choisi son moment puisque les mages les plus puissants de la cité étaient réunis dans la pièce où il venait d'apparaître. Cela ne ressemblait pas vraiment à la sournoiserie démoniaque.  Mais étant donné l'énergie noire qui avait précédé l'apparition, la garde du corps de la Reine n'hésita pas longtemps avant de lancer un sort d'entrave alors que d'autres mages passaient directement à l'offensive. Lùthien n'eut pas vraiment le temps de s'inquiéter, ou de juger du bienfondé de ces réactions et se retrouva devant l'individu maintenant immobilisé sous la lame de l'invocation de Brann Leckard. Être défendue par un Leckard, c'était un comble. En tout cas le patriarche n'avait pas manqué cette occasion de se faire bien voir. Puis Luna se permit quelques commentaires sur les intentions de l'intrus, essayant visiblement de calmer le jeu. Lùthien ne doutait pas des capacités spirituelles de la directrice de Méridius... mais c'était pour cette raison qu'elle se refusait à la croire aveuglément.
Par précaution, elle s'approcha à une distance prudente et sonda elle aussi rapidement l'esprit de l'intrus en se concentrant sur les souvenirs récents. Il opposa une certaine résistance mais elle finit par obtenir des informations similaires à celles de Luna. Son interprétation en était cependant un peu différente : ce n'était pas parce que ce mage avait juste fuit son monde qu'il ne représentait pas un danger pour Targatt.

Lùthien était intriguée cependant et continuait à fixer celui qu'elle finirait par connaître sous le nom de Yahn Wards. Elle oublia presque que l'assemblée guettait probablement la moindre de ses réactions.  Ce portail ne ressemblait à rien qu'elle ait déjà vu... elle avait passé près d'un siècle de sa vie à étudier les voyages planaires, ce qu'elle venait d'observer était rare, mais les anciens avaient décrit des phénomènes similaires...  L'invocatrices s'arracha à ces réflexions, elle pourrait étudier la question plus tard. La reine en elle reprit le pas sur la mage, et elle répondit à Luna.

- Certes, dame Langevin, mais ce n'est guère le lieu pour un interrogatoire.

La reine s'adressa ensuite au nouveau venu qui pouvait maintenant la comprendre grâce au sort de Luna.

- Vous êtes tombé au mauvais moment, voyageur... je vous conseille de rester tranquille.

Yahn fut emmené par deux gardes royaux. Si il se montrait docile, il serait soigné puis logé dans une chambre du palais, mais sous bonne garde. On lui imposerait également un bracelet anti-magie par précaution. S'il montrait le moindre signe d'hostilité ou de résistance, il serait jeté aux cachots sans hésitations.  Une fois l'invité surprise évacué, la reine reprit sa place pour s'adresser à l'assembler.

- Chers convives, si après cet incident certains souhaitent regagner leur demeure, nul n'en sera offensé.

En disant cela, Lùthien jeta un regard rapide à Saéline et Chad avant de poursuivre.

- Cependant, le bal est maintenu ! Nous avons repoussé une attaque démoniaque... Une petite distorsion spatio-temporelle ne devrait pas nous empêcher de danser !

Les médecins royaux accoururent pour soigner jusqu'aux plus petites égratignure et inviter ceux qui le désiraient à se reposer dans des salons plus privés. Les serviteurs - usant de magies diverses - remirent la salle en état en un rien de temps, et les tables furent à nouveaux chargés de mets divers et de boissons à même de réconforter les invités. La musique reprit ensuite progressivement, d'abord comme simple ambiance de fond pour laisser à chacun le temps de se remettre de ses émotions. Puis à nouveau comme musique de bal. Si l'occasion se présentait, et que ses gardes du corps n'étaient pas trop inquiétés, la reine comptait bien se joindre à la danse elle aussi à un moment ou un autre.

Quand on balaie une mouche de la main, elle revient aussitôt. C'était ce que je pensais en voyant Damian Stroke revenir à mes côté alors que le bal avait enfin commencé. Je ne pouvais pas lui en vouloir. Après tout, j'étais celle qui lui avait indiqué de revenir. Une invitation qui devait déterminer s'il était la mouche que je soupçonnais ou autre chose pouvant servir mes intérêts dans un sénat auquel je refusais de me plier.

Initialement, je devais pencher vers ma pensée initiale. Dans un bal où les politiciens allaient tous venir pleins de questions et de flatterie, Monsieur Stroke fut le premier d'entre-eux. Il n'y avait rien de surprenant de la part d'un membre du Sénat. L'inverse aurait été plus dangereux aussi bien pour lui que pour moi et il aurait fallu que Constantza aille chercher de quoi nourrir ma curiosité à ma place. Je n'allais pas risquer de ridiculiser ma position en cherchant à tout prix et devant toute la haute société de Targatt à m'entretenir avec un sénateur proche des Leckard. Car c'était bien là la raison m'ayant conduit à l'inviter à revenir plus tard et maintenant à lui sourire tandis qu'il me félicitait pour la façon dont j'avais mené la bataille d'Helmancourt : la famille Leckard.

Cain était un allié précieux, mais dangereux. Un canon de verre capable de faire de grand ravage aussi bien politique que matériel et humain en un rien de temps. Le simple fait de mentionner son nom était source de longues discussions avec la Reine après tout. Mais il était fragile, aussi bien sur le plan psychologique que sur le plan intellectuel. Il avait de grave lacune en politique et en éloquence qui pouvait rendre une de ses interventions aussi douloureuse pour lui que pour ses adversaires. Or une douleur chez lui, maintenant que j'en assumais pleinement la protection, déteignait sur moi. Le jeune Leckard était trop dangereux à présenter en son état actuel et je m'étais résolue à agir avec lui comme une sorte de tutrice plus qu'autre chose. C'était la meilleure chose à faire pour le moment.

Alecto était un Leckard modéré. Une anomalie. Il n'assumait presque pas sa position dans sa propre famille et restait très habilement en dehors des affaires de l'Etat. Le plus longtemps il restait en dehors de ces tracas, le plus longtemps je n'avais pas à me soucier de lui.

Restait enfin le plus insaisissable des Leckard et qui cherchait à égaler un homme dont il n'était que la médiocre ombre : Brann. Sa position au Sénat le rendait dangereux car son éloquence et l'influence, même ternie de sa famille, lui permettrait, s'il le désirait, de monter Targatt contre le Vice-Royauté. Or, avec cette "constitution", la Reine ne pourrait indéfiniment pas s'opposer aux intentions belliqueuses de son Sénat et alors, il plongerait Targatt dans le guerre. Une éventualité comme une autre. Mais une éventualité dangereuse pour mon jeune pouvoir que je consolidais grâce à la Grande Armée et qu'une fois passée dans l'au-delà, je ne pourrais plus maîtriser. De surcroît, Brann Leckard n'était pas le genre d'individu que j'irai voir pour la simple et bonne raison que je soutiens et protège Cain, autre prétendant à la patriarchie des Leckard. Dans ces conditions, les discussions seraient vouées à l'échec.

J'avais donc besoin d'un cavalier à peu près seul pour tourner autour du plus vivant des Leckard, pour envisager ses desseins, pour le sonder et, in fine, l'anticiper. Le sénateur Stroke pouvait répondre à ces critères et la discussion pourrait éventuellement me l'indiquer.

"Sénateur Stroke, vous faites l'éloge d'une Vice-Reine et maréchal. Je suis naturellement flattée par le fait qu'un membre du Sénat se rappelle de mes services envers le Trône pour qui je ne suis qu'une humble servante au dessus des autres."

La pic lancée envers la Reine pouvait être justifiée. Mais au vu des accords passés avec la Reine et de mes intentions de garder la Couronne fidèle au Trône aussi longtemps que ce dernier ne lui ferait pas de tort, il me fallait jouer carte sur table et révéler mes allégeances. Néanmoins, il était parfois bon de rappeler à ceux qui obtinrent par quelques bulletins leurs noms criés sur la place public, j'avais fait en sorte que le miens soit loué et haïe par la guerre. Dans ces conditions et à une époque où le pouvoir est détenu par ceux qui dépouillent les urnes, rappeler la préséance de la Vice-Royauté sur le Sénat n'était pas de trop.

"En effet... Arakis et Melghir étaient des cités marchandes libres avant de tomber aux mains des démons. Elles abreuvaient de céréales pour la première et des richesses provenant des quatre coins de la mer d'Azure pour la seconde tout l'Ouest d'Ereb. Il est naturel qu'elles redeviennent les centres commerciaux qu'elles furent. Aussi bien dans l'intérêt de Targatt qui a pendant trop longtemps connu la disette que pour le mien Monsieur le Sénateur. Quelle monarque je ferais si je ne rendais pas leur splendeurs aux deux diamants que je me suis offert."

Je disais cela avec un léger sourire. Car oui, je m'étais offert Arakis et Melhir malgré les accords que j'avais pu avoir avec Edouard de Nogaret, malgré les éventuelles représailles de la Reine, malgré mes origines, malgré l'image que l'on m'avait imposé sous le règne de Drake Leckard. Désormais, comme les diamants pendus à mes oreilles, Arakis et Melghir étaient des bijoux qui ponctuaient les dernières phrases de mon ascension comme elle serait racontée dans les sagas cherchant à retracer ma vie, évidemment sous ma dictée. Arakis et Melghir était le siège d'un pouvoir par delà les montagnes et que Targatt et son Sénat devait prendre en compte, au moins pour s'assurer que la Couronne ne se mêle pas des affaires du Trône.

"La vie de sénateur ne vous change pas trop Monsieur Stroke ? Je dois vous avouer que je ne suis pas habitué à porter le pourpre et boire tous les jour dans de l'argenterie. Ce n'est pas dans l'habitude des Germaniques. Ce n'est pas non-plus dans la votre il me semble de ne pas porter l'armure et participer aux débats dans un hémicycle avec comme seule arme votre voix et sans aucune arme?"

Qui ne savait pas qu'il était un ancien soldat ? Peu de personne et je n'en faisais pas parti. Je ne connaissais pas le sénateur autrement que de nom. Mais naturellement, une rapide enquête sur qui sont les membres du Sénat me permirent de connaître ce genre de détails.

Néanmoins, la conversation entre le sénateur et moi allait devoir attendre en récent des événements. Tandis que tout se passait le plus normalement du monde, une faille s'ouvrit et une bouffée de magie vint transformer la salle de bal en un souk. Mes pensées, à cet instants furent diriger vers ma personne et celle de Constantza. un rapide coup d'oeil me fit comprendre que ma nièce par alliance était assez robuste pour tenir le coup de ce genre d'intrusion. Néanmoins, sans mon portail d'évacuation que j'avais dû utiliser pour envoyer Cain à l'autre bout du continent, j'étais forcée de faire face et me tenir prête dans le cas où ce qui sortait de la faille était hostile. Si c'était le cas. Ce serait grave, très grave. Suffisamment grave pour que je prenne immédiatement la route du Fort Helmancourt duquel je mobiliserai la Grande Armée pour rétablir l'ordre dans cette cité. Je n'avais pas l'intention de m'imposée comme dictateur au dessus de la Reine, ce serait du suicide. Mais une démonstration de force face au manque de préparation de la monarchie pouvait faire basculer les choses.

Fort heureusement pour la paix, ce ne fut qu'un humain qui sortit de la faille et en plus de cela, perdu et amoché. Soit, cela ne devait donc pas être très grave et les recherches rapide de Langevin et de Sa Majesté semblaient aller en ce sens. Très bien, alors, il ne restait donc plus qu'à reprendre la discussion là où elle s’était arrêtée.

"Pour sûr Sénateur, Sa Majesté aime les distractions. Au point de faire d'une intrusion un événement normal. Mais je suppose qu'un tel événement reste surprenant pour un sénateur d'une cité ayant vaincu des démons et qui, pourtant, souffre d'une faille spatio-temporelle en pleine salle du trône."

Chad se montrait plutôt protecteur en cette soirée. En d'autres circonstances, elle aurait peut-être cherché à montrer qu'elle était aussi capable de se défendre par elle même, mais avec sa grossesse elle se sentait étrangement vulnérable. Elle était donc finalement plutôt contente d'avoir quelqu'un pour veiller sur elle.
Quand Delphine se présenta devant elle, Saéline lui adressa un sourire radieux et rassurant. Elle était incroyablement heureuse de voir sa fille à ses côtés à nouveau et elle la trouvait tout à fait ravissante dans sa robe couleur lavande.

Le ballet ne fut pas une grande surprise pour l'elfe étant donné qu'elle avait assisté aux répétitions, cela ne l'empêcha pas de scruter chaque pas pour s'assurer que tout se déroulait bien comme prévu. Ce fut le cas, du moins au début. Saéline fut ravie que son compagnon l'invite à danser et elle accepta avec joie. Elle profita un moment des mouvements harmonieux de leurs corps qui se déplaçaient au son de la musique, tout en jetant des regards discrets à Delphine pour voir comment elle se débrouillait pour son premier bal. Saéline avait été très occupée par les préparatifs, mais elle avait fait en sorte que sa fille reçoive quelques leçons de danse avant l'événement pour qu'elle ne soit pas désemparée face à des pas et musiques inconnues.

Comme Lùthien cependant, elle finit par remarquer que quelque chose n'allait pas. Sentant le phénomène s'accentuer, elle eut le réflexe de se téléporter avec Chad juste avant que le cyclone miniature n'éparpille les convives aux quatre coins de la pièce. Elle atterrit aux côtés de la reine, accrochée à son compagnon. Après l'attaque, elle s'était promise de faire passer la sécurité de son enfant avant tout, si les choses tournaient mal, elle ne comptait pas s'attarder dans les lieux. Elle cherchait cependant nerveusement Delphine des yeux, elle aussi était son enfant et elle aurait du mal à fuir sans la savoir en sécurité. Comme beaucoup, elle tenta d'utiliser ses boucliers magiques mais en vain. L'intensité de l'énergie négative émanant du phénomène la faisait suffoquer et les douleurs dans son ventre reprirent soudain. Elle lutta un moment mais les crampes étaient telles qu'elle sombra dans l'inconscience en murmurant le nom de Delphine.

A la réaction de surprise de Delphine, je ne pu m’empêcher de sourire et de surcroît, attraper par réflexe le livre qu'elle lisait jusqu'à présent. Elle était si facilement surprenable. Si je n'étais pas de nature si rigoureuse, je serai presque tentée de lui rappeler notre toute jeune amitié via quelques surprises du même genre dans les dortoirs de Meridius.

Malheureusement pour moi, je n'étais pas ce genre de fille. De temps en temps une telle approche pouvait avoir son sens. Mais tout le temps ? Non. Cela deviendrait lassant. Or, je n'avais pas envie de me lasser de Delphine. Je l'aimer bien et j'avais envie de me rapprocher d'elle. Ce que je fis physiquement en m'asseyant juste à côté d'elle tout en parcourant faussement son livre désormais entre mes mains.

"Oh, les dieux n'ont rien à voir avec ça. Et puis, ce n'est pas comme si ça me gênait~"

Son regard, juste après avoir juré, allait directement à l'encontre de sa défense. Même si je n'appréciait pas totalement cette tenue, le fait qu'elle retienne le Delphine me disait que ce n'était pas totalement un échec. Le regard des autres, en dehors de ceux qui m'étaient supérieurs, m'importait peu. Apèrs tout, je servais un intérêt plus grand. Néanmoins, savoir que mon petit désir à mon échelle prenait forme me rassurait.

"Nul besoin de promettre Delphine. Je préfère que ton regard m'habille plutôt que celui des autres convives."

J'y étais peut-être allé un peu franchement sur cette saillante tentative de séduction. Delphine n'allait pas forcément régir comme je l'espérais. Après tout elle était timide et luttait déjà pour continuer à me regarder dans les yeux. Cependant, il est difficile de refaire une éducation où les hommes comme les femmes font le premier pas et sont assez franc sans devenir insultant.

Fort heureusement, je fit revenir la conversation à la danse et au fait que Delphine elle-même ne dansait pas. Je m'attendais surtout à ce qu'elle se renferme à la question plutôt qu'elle ne me la retourne ce qui me prit de court. De l'initiative de la part de Delphine ? Voilà qui devenait encore plus intéressant.

"Ahh... J'ai beau deux jambes et deux bras, ça n'empêche pas que j'ai quelques blessures de guerre. En résumé je ne suis pas assez souple pour danser autre chose que des danses martiales. alors danser des valses ou des danses elfes, ce n'est pas aujourd'hui que je compte y arriver."

Je lui souriais en pensant que je mentais grossièrement en disant avoir deux bras et deux jambes. Si c'était aussi simple...

"Mais je suis certaine qu'avec une bonne professeur, je pourrais apprendre ? après tout, Harmony est bien parvenue à me faire marcher différemment de l'ours que je suis."

Alors je que continuais en sourire à Delphine en lui rendant son livre, la demi-elfe se crispa et soudainement, fit apparaître un bouclier. Je fus surprise par la réactivité de Delphine et je ne la connaissais pas sous cet angle là. Cependant, je fus obligée de revenir à ce qui se passait autours de nous. Je m'étais autorisée un moment de déconcentration et de relâchement, notamment pour préserver ma télékinésie. Mais quand je vie la bourrasque de vent balayer tout autour du bouclier que Delphine venait de faire, je repris mes repères et attrapa Delphine tout en renversa la table à laquelle nous étions jusqu'alors assises afin d'ajouter une couche supplémentaire à la protection créée par la demi-elfe.

Pourquoi fallait-il que ce genre de chose arrive maintenant ? Et surtout alors que je n'avais pas d'arme ! Ma tante devait en avoir une cachée quelque part dans son armure. Mais moi, avec une telle robe, il était presque impossible que je cache une lame. Je n'étais pas une elfe-noire capable de cachée des lames n'importe où sur elle !

Heureusement, d'autre convives avaient de quoi s'occuper de la bien petite menace qui sortie du portail spatio-temporel et elle fut rapidement maîtrisée. Même minimisée ! Même si j'étais la nièce de Wilhelmine, je trouvais surprenant cette attitude de la Reine. Mais j'avais encore des choses à apprendre sur la façon de régner aussi bien de la souveraine que de ma tante car cette dernière non seulement n'avait pas levé le petit doigt à la suite de l'incident, mais en plus de cela continuait de parler avec les invités comme si de rien était. C'était à croire qu'une amnésie collective avait prie les plus importantes personnes du royaume...

Mon attention fut néanmoins ramenée à Delphine qui s'effondrait entre mes bras. Avec une douceur insoupsonnée, je pris une chaise, tout en la soutenant, et l'y assit alors que tout autours de nous retrouvait son état d'avant l'intrusion.

"Eh ! Eh Delphine ! Reste avec moi ! Je vais te chercher de l'eau et de quoi te remonter à bloc ! Attend un instant !"

Malheureusement pour Delphine, le remontant n'avait rien d'elfique et quand je revins en trottinant pour éviter de m'effondrer sur le sol avec mes talons et robe, c'était avec une coupe d'eau et un tout petit verre contenant un liquide transparent : de l'eau de vie, le meilleur moyen de réveiller un ours endormi.

"Delphine, bois-ça d'une traite ! Allé !" lui dis-je en la regardant légèrement inquiète.

A peine avait-il prononcé ses quelques mots de paix à l’intention de celle qui semblait être la dirigeante de ce lieu que Yahn sentie les poils de sa nuque se hérisser et la sensation désagréable des tripes qui se crispent tandis que les sens hurlent l’alerte. Cela faisant des années qu’il n’avait plus eu à ressentir de telles sensations…plus depuis le second affrontement contre le démon… il avait horreur de ce sentiment instinctif qu’un danger était imminent car bien qu’il puisse s’avérer salvateur, il pouvait tout autant brouiller le sens logique et l’acuité de la réflexion… mais quand, dans la fraction de seconde qui suivit ce ressenti, son oreille capta le son du crépitement de l’électricité, son corps se mut de lui-même, ses talons pivotant légèrement sur sa droite et de sorte à écarter légèrement les jambes pour avoir des appuis solides et se positionner à 45° par rapport à la direction du potentiel danger tandis que sa main gauche glissait du pommeau à la garde, empoignant son fourreau, prêt à sortir sa lame.
Bien qu’il n’aimait guère l’emprise du réflexe physique sur la maîtrise de l’esprit, on ne remettait pas en question une corps aiguisé par quatre siècles de guerres ; quand l’instinct survient, il appartient de le suivre et d’analyser au plus vite les raisons de ce réflexe pour reprendre le contrôle et agir efficacement.

L’instant suivant le mouvement, l’Ishaldi perçut une lumière fugace avant de ressentir une vive douleur dans son mollet perforé suivie de la gêne persistante des muscles et tendons soumis à la contraction forcée allant de sa cheville à sa cuisse. De toute évidence, il venait de recevoir un trait de foudre à la jambe, c’est donc cela que ressentaient ses propres adversaires au combat ? quelle sensation désagréable … mais le mollet est une cible inintéressante … son agresseur devait probablement viser plus haut, la cuisse ou l’épaule serait le plus logique pour bloquer un adversaire dont on n’a pas encore pu prendre la mesure. Le fait que ce soit son mollet qui soit atteint laisse devenir que la cuisse était la cible, mais que le trait a été attiré par la plaque de métal protégeant son tibia dont sont composées ses grèves, le déviant donc sur le mollet. Heureusement, cette fameuse plaque ajoutée au réflexe de sa position permirent que le trait ne perfore que le muscle sans frapper l’os, évitant de lui briser la jambe.
Il n’avait pas daigné baisser les yeux vers la blessure, il ressentait et pouvait donc estimer les dégâts, c’était suffisant et n’autorisait pas l’erreur de quitter la menace des yeux. Yahn distingua du coin de l’œil une femme déployer une sorte de familier lumineux et un autre être déployer des ailes ;il ne put s’empêcher de s’interroger sur la présence d’un Lêeth ,ce qui soulevait de nombreuses autres questions …
Cette fugace distraction le détourna de l’apparition d’une sorte d’invocation d’armure habitée uniquement par la magie dont il rata l’identification de l’invocateur, cette dernière chargeant sur lui. Le but était sans doute de le renverser et s’appuyant sur sa jambe déjà touchée pour réussir l’action sinon il n’y avait aucun intérêt à une telle charge.
D’abord, neutraliser l’arc électrique de celle qui avait ouvert les hostilités ; Yahn se concentra brièvement dessus, leva sa main droite de quelques centimètres à peine, pas trop pour que l’assistance n’identifie pas son action, et referma le poing et … rien.
L’armure n’était maintenant plus qu’à quelques mètres, il lui fallait gagner quelques secondes pour identifier le problème et se débarrasser de l’archère. L’Ishaldi posa son regard sur l’invocation et projeta une vague psychique pour la renverser plusieurs mètres en arrière … mais rien de nouveau !
Il y avait un problème avec la magie … tant pis, il devrait faire sans.
Sa position de faiblesse, légèrement incliné sur l’avant dû à sa jambe blessée semblait le mettre en mauvaise posture. Au fait que l’armure charge depuis une telle distance, Yahn devina que son invocateur n’était pas un fin stratège ni un maître dans le maniement des armes, aussi garda-t-il sa position de faiblesse jusqu’au dernier instant, celui où l’armure initierait son mouvement, l’épée ou le bouclier ? la gauche ou la droite ? le bouclier !

L’ishaldi dégaina immédiatement sa lame tout en se redressant alors que l’armure amenait son bouclier vers l’avant, dans la continuité du mouvement, il décala son buste vers l’arrière pour ne pas subir l’impact tout en glissant le pommeau de son épée derrière le bord droit du bouclier, sa main gauche sur la lame ; il vint l’appliquer à l’épaule de son adversaire, juste derrière l’aisselle. Il décala sa jambe droite tendu par la foudre hors de la ligne de charge, dans l’alignement de son corps, et poussa sur sa jambe d’appui gauche en effectuant une pression simultanément de ses bras sur sa lame, crochetant ainsi la charge de l’armure et l’envoyant valser de deux ou trois mètres dans la continuité de sa charge. C’était peu… bien peu ... s’il avait pu s’aider plus sérieusement de sa jambe droite, cette armure ne serait plus un problème pendant les longues secondes nécessaires à l’étude de la situation …
La fin du mouvement fut quelques peu hasardeux, Yahn eut du mal à reprendre un bon équilibre et manqua de s’étaler, les attaques de foudre étaient décidément bien ennuyeuses lorsqu’on les subissait plutôt que d’en être l’instigateur. Dans sa tentative pour retrouver une posture à peu près correcte, il jeta un coup d’œil à la situation ; une forte dose d’énergie émanait de la direction de plusieurs mages et l’opacité visuelle autours d’eux laissées entendre qu’il s’agissait de bouclier. Ils n’étaient donc pas tous hostiles, il était même fort probable que son agression ne soit que le fruit préventif d’une peur d’être agressé.
Une grande salle, une archère magique, plusieurs mages dans toutes les directions, des gardes qui commencent à s’affairer, et l’absence de ses pouvoirs. La situation était un cul de sac.
Yahn saisit la seconde qui lui restait avant la nouvelle charge de l’armure pour faire face de nouveau au trône, planta son regard dans celui de son occupante et jeta son arme au sol devant lui en geste de reddition.

L’armure fut sur lui l’instant d’après, le plaquant au sol et il senti le contact froid de l’acier sur sa peau, ils étaient prêts à le tuer s’il devait y avoir d’avantage d’hostilité… Il ressenti alors deux choses, l’une plus inquiétante que l’autre … d’abord, on essayait de pénétrer son esprit, pire, on y parvenait, et elles étaient deux !
S’il n’avait pu utiliser ses pouvoirs, il n’y avait que peu de doute sur le fait que ses défenses psychiques devaient être celles d’un apprenti actuellement voir carrément inexistantes … Il s’efforça alors de ne pas donner de pensées claires à voir aux intruses, plus de 400 ans d’existence vous offrait suffisamment de vécu pour avoir un fil de pensées totalement décousues et incohérentes. Mais il semblerait qu’il ne fut pas assez vif car toutes deux ressortirent de son esprit et agir en conséquence. Qu’avaient-elles vu exactement ? il n’en était pas sûr…
Ensuite, on fit usage de magie sur lui, mais dans quel but ? il ne ressenti aucune douleur ni changement particulier et sa magie était déjà indisponible … C’est lorsqu’on commença à s’adresser à lui qu’il comprit. Voila qui était nouveau, il n’avait jamais connu de sort de langage et cela piqua légèrement sa curiosité. Les mots qu’elles prononçaient chacune lui étaient étranges mais sonnaient familier ; Yahn s’efforça de ne pas y penser pour éviter de donner de plus amples informations à quiconque fouillerait de nouveau en lui. Le sort de langage fit son effet et quelques mots résonnèrent en lui, comme une impression, comme si sans comprendre les mots prononcés, il comprenait pourtant le sens de la phrase ; on lui demandait de se tenir tranquille et d’obéir.
Des gardes le relevèrent, lui mirent une breloque au poignet et l’emmenèrent hors de la salle.

Pourquoi ce bracelet ? un sort létal en cas d’hostilité ? un sort de soumission ? un bloqueur de magie ?
La dirigeante semblait avoir de la curiosité à son égard, le sort létal était peu probable, bien que lui n’aurait pas hésiter. Reste la soumission ou le bloqueur de magie. S’il s’agissait de soumission, pourquoi ne pas l’avoir employé devant l’assistance pour lui faire révéler tout ce qu’elle souhaitait ? une dirigeante de modérée ? et s’il s’agissait de soumission, il n’aurait pas été nécessaire de le faire accompagner sous bonne escorte… donc il était plus probable qu’il s’agisse d’un bloqueur de magie. Dans ce cas, l’impossibilité qu’il avait d’employer ses pouvoirs durant le bref affrontement devait venir d’une personne de l’assemblée. Il en avait identifié trois qui avait pris des postures plus défensives, peut-être était-ce l’un de ceux -là … le Lêeth notamment, ces êtres étaient capables de sorts dérangeants de ce genre pour affirmer leur pseudo supériorité… Il en aurait la certitude si on lui retirait le bracelet en la présence de l’un deux …

On l’emmenait, et il lui faudrait mettre à profit les quelques instants qui sépareront sa détention de son interrogatoire pour réfléchir sérieusement à la situation …

Le bal

La jeune femme était intervenue directement lorsqu'après l'anomalie, l'inconnu était apparu. Elle avait sans doute agit trop promptement, mais elle préférait qu'il ait une blessure à la jambe plutôt que certains des invités puissent être blessés, ou pire, tués. Après tout, ce voyageur était arrivé en faisait état d'une magie des plus néfaste et non sans rappeler certains des démons qu'ils avaient combattus, bien que le sort employé pour cette personne semble presque encore plus sombre.

Puis tous les autres invités avaient eu leurs propres réactions, aussi disparates qu'étaient le caractère de chacun. La plupart cherchèrent protection auprès des autres, ou à protéger les autres, ou soi-même. Seul Brann au final, avait agi de concert avec elle. Il avait fait apparaitre une armure au moment où sa flèche avait filé vers la cuisse de l'intrus... d'ailleus cette dernière avait touché plus bas que prévu. C'était étrange... Elle manquait rarement sa cible, d'autant plus quand cette dernière se mouvait peu comme c'était le cas ici.

Cependant quelque chose n'allait pas avec l'intrus. Il lui avait semblé qu'il avait tenté quelque chose. Avait-il réussi ? Elle n'avait pas perçu de magie à l’œuvre mais on ne savait jamais. Quoi qu'il en soit, l'inconnu avait regardé l'assemblé et esquivé avec facilité la première charge de l'armure avant de lâcher son arme en signe de reddition et de se faire plaquer au sol.
Tendis que tout le monde observait la scène, c'est la garde royale qui finit par mettre des menottes à l'homme avant de l'entrainer plus loin. Ambre continua de regarder la porte par laquelle ils étaient sortis bien après qu'aucun d’entre eux ne soient encore dans son champ de vision, et après que la Reine ait décrété que le bal pouvait continuer.

C'est tout ? Bon, sans doute était-il effectivement plus sage de mettre l'homme de côté et de laisser les convives s'amuser et ainsi laisser penser que tout cela n'était rien. Cependant, tait-il aussi sage de ne l'interroger que des heures plus tard ? Car tant que le bal durait, la Reine ne pourrait s'absenter sans se faire remarquer. Ce qui signifiait qu'elle ne comptait pas l'interroger maintenant. Ou pas elle-même. Elle était le souveraine, pourquoi interrogerait-elle un prisonnier elle-même alors qu'elle avait des gens pour le faire.

Ambre secoua la tête, jugeant qu'elle devait s'inquiéter pour rien mais c'est la voix de Brann qui la tira de ses réflexions. Elle cilla ne fois et croisa son regard doré auquel elle adressa un sourire enjoué, trop ravie qu'elle était qu'il prenne de ses nouvelles. Elle posa une main sur celle de son cavalier.

"Je vais bien, je ne sais pas ce qu'il comptait faire, mais je ne pense pas qu'il ait réussi. Et toi ?"

Elle se doutait de la réponse mais on ne savait jamais. Aussi avait-elle préféré demander. Ambre suivit son amoureux un peu à l'écart tendis que les conversations reprenaient, de même que la musique, comme si de rien n'était.
S'asseyant sur le sofa, elle inclina légèrement la tête sur le côté tout en remettant en place une mèche de cheveux roux. Les vents puissants qui avaient émané de l'anomalie un peu plus tôt l'avaient complètement décoiffée.

Brann la complimenta quand à la vivacité de ses réactions, bien qu'elles aient été produites par la peur plus qu'autre chose. Ambre se mit à rougir fortement et se figea. Brann était sans conteste meilleur qu'elle à tous les niveaux et d'une certaine manière elle s'en voulait qu'ils puisse la croire meilleure qu'elle ne l'était. Toutefois, elle ne pouvait non plus se mentir à elle-même. Ca lui faisait extrêmement plaisir et ça avait suffit à faire battre de nouveau son cœur rapidement, le petit baiser qu'il osa lui déposer sur les lèvres n'arrangeant rien de ce côté là.

Avec un large sourie, un brin béat, elle saisit la main de Brann et l'entraina à sa suite hors de la salle de bal, vers les jardins. Ils devaient être ouverts aux convives puisque la salle de bal donnait en parti sur ceux-ci. Ambre comptait en tout cas trouver un coin tranquille où ils pourraient profiter l'un de l'autre à l'abri des regards. Le plus simple aurait été de quitter le bal et d'aller chez l'un ou chez l'autre mais ce n'était pas possible.
Du moins elle supposait que ça ne le soit pas pour lui, et de toute façon elle aurait trop impressionnée et gênée pour accepter une telle proposition. Et si par malheur elle revenait trop "tôt" de la soirée, c'est sa mère à elle qui lui tomberait dessus puisqu'elle était censée représenter la famille lors de cet évènement. Toutefois, rien ne les empêchait de faire bande à part quelques part dans le château, du moins, pour des lieux autorisés mais moins étroitement surveillés.

Une fois le lieu idéal trouvé, Ambre n'avait pu s'empêcher de venir se lover contre lui, profitant de sa chaleur et de sa présence.

J'étais heureux de pouvoir échanger quelques pas de danse avec Sofia  et comptais bien l'inviter à nouveau quand les choses seraient rentrées dans l'ordre. L'indifférence de la reine était assez surprenante, mais l'incident semblait effectivement clos et le portail bien fermé. Alors je me concentrais sur les blessés.
Il y avait derrière moi une jeune elfe qui semblait sur le point de défaillir et à qui on apportait un verre. Je m'approchais rapidement et ôtais le verre d'alcool des mains de la jeune fille aux cheveux verts qui s'avérait être la nièce de Wilhelmine. J'ignorais d'où venait la manie de ces germaines de se teinter en dryade, mais cela avait le mérite de les rendre reconnaissable.
- Ce n'est pas comme ça que vous allez l'aider, Mademoiselle Von Sclacht.
J'examinais rapidement l'elfe qui semblait à peine capable de suivre quelque chose du regard. Elle avait complètement épuisé ses réserves magiques et n'avait probablement pas bien supporté l'énergie négative qui avait envahit la pièce. Son état me faisait penser à celui d'Alexia, encore une petite lumineuse qui n'avait pas conscience de ses limites ! Je lui redonnais juste assez d'énergie pour qu'elle retrouve un état normal. Il lui faudrait encore un peu de temps avant d'être en état de lancer à nouveau un sort mais elle se sentirait déjà beaucoup mieux.
- Voilà. Evitez la magie jusqu'à demain.
Je m'inclinais légèrement avant de laisser les jeunes filles.
- Je vous souhaite une bonne soirée, Mesdemoiselles.
Je rejoignis Sofia pour l'aider avec les quelques blessés qui s'étaient rassemblés dans un coin calme. J'eu la surprise de voir venir vers moi un Adamo de Rayem à l'air jovial qui me proposait avec familiarité son aide. J'avais remarqué la présence d'Adamo un peu plus tôt sans toutefois oser le saluer. J'étais vraiment soulagé de savoir qu'il était vivant, mais avec tout ce qui s'était produit entre nos deux familles, j'ignorais quelle pouvait être maintenant son opinion moi. Je ne pensais pas qu'il m'accorderait un accueil aussi chaleureux et je restais un instant interdit avant de lui rendre légèrement son sourire et d'accepter son aide.
- Je... Avec plaisir Adamo.
Quand nos patients furent tous sur pieds,  je m'adressais de nouveau à lui et lui tendit la main pour le saluer comme il se devait.
- Content de te revoir.
Je fis signe à Sofia de nous rejoindre pour lui présenter cette vieille connaissance. Ils avaient dû se croiser de temps à autre par le passé mais je doutais qu'ils s'en souviennent.
- Sofia, voici Adamo de Rayem qui est également guérisseur. Adamo, tu te souviens peut-être de ma femme Sofia ?