Visite médicale d'arrivée

Visite médicale d'arriver

Le lendemain de son arrivée à l'académie, et dans la maison Talmar, il reçut une convocation pour une visite médicale qui, semblait-il, était de rigueur pour chaque nouveau venu. Ca semblait logique et pour le coup, être assez habile pour connaitre le passif de chaque élève, au moins corporellement parlant. Connaitre les forces et les faiblesses de chacun des étudiants. ca permettait sans doute d'être plus efficaces dans les soins en cas de blessure importante, d'une pathologie quelconque ou, de savoir où frapper, en cas de nécessité. Après tout, le directeur de Talmar avait fortement insisté sur la notion de "danger" que représentaient certains élèves. Dès lors, il ne serait ni étonnant, ni aberrant qu'ils prennent note des faiblesses de chacun, au moins structurelles.

Devant une logique qu'il pensait imparable, il ne pouvait que s'y conformer. Aussi frappa-t-il brièvement à la porte de l'infirmerie à l'heure donnée, ne souffrant pas d'une seule seconde de retard sur l'horaire. Il entra quand l'autorisation lui fut donnée et referma la porte derrière lui avant de faire quelques pas dans l'infirmerie, découvrant la pièce et notant instinctivement le nombre de lits, la disposition des lieux, des fenêtres, des portes et surtout, des onguents et autres produits intéressants. Enfin, son regard totalement dénué de la moindre expression se posa sur la femme qui lui adressait la parole à laquelle il tendit simplement le parchemin de convocation. Ca valait bien comme des présentations non ? Son nom était marqué dessus après tout.

Visite médicale d'arrivée

Le jeune yamilo avait été surpris lorsqu'elle s'était présentée en lui proposant de retirer le rada'an. Oh bien entendu, le professeur Daragonne l'avait averti que le personnel de l'académie pourrait, dans une certaine mesure agir sur l'objet mais il ne s'était pas imaginé un seul instant qu'il se trouve quelqu'un dans l'académie qui eut envie de le lui retirer. Il lui jeta un coup d’œil.

"Vous n'avez pas peur de moi ?" sa question pouvait sembler stupide. Si elle avait eu peur, jamais elle ne le lui aurait retiré. Mais c'était étonnant compte tenu des mises en garde de Kubilay au sujet de la perception de sa nature par les autres notamment.

Elle glissa les mains dans le cou de Cirth et sur l'objet magique qui s'ouvrit en se désactivant. L'infirmière le posa sur son bureau tendis que le jeune homme, machinalement, se massa un peu le cou, légèrement endoloris par le collier. Sa magie était revenue instantanément et il n'y avait pas à dire, le rada'an lui donnait vraiment l'impression qu'on l'amputait d'un membre à chaque activation... Tant pis. Il devait le supporter le temps de ses études. Il le ferait donc.

Alexia lui proposa de s'asseoir sur le sofa présent dans la pièce et s'il souhaitait manger ou boire quelque chose. Il prit place sur le divan comme on le faisant sur une chaise et eut un instant de flottement. Il ne lui semblait pas avoir ni faim ni soif. Ce qui lui évitait d'avoir à choisir quoi que ce soit puisqu'en dehors de l'eau ou des potions de soin il n'avait jamais rien bu d'autre. Pourtant, son odorat lui offrit une tentation. Il avait sentit cette odeur. Kubilay lui avait fait gouter le jour de leur rencontre. Du chocolat.
Il hésita une seconde. Il n'avait pas vraiment faim. Mais il aurait bien eu envie de gouter de nouveau à cette friandise. Ca lui semblait dérisoire en un sens d'avoir une telle envie que si il était capable de ressentir quelque sentiment complexe, il aurait pu en avoir honte.

"Si vous avez du chocolat, j'aimerai bien en gouter un peu. S'il vous plait." Ajouta-t-il précipitamment en se rappelant que ce que les autres élèves appelaient "politesse" leur permettaient d'obtenir plus facilement des choses bien qu'il ne sache pas pourquoi. Après tout, quelle qu'en soit la forme, une réclamation en demeurait une. Il avait ainsi vu une fille accepter d'aller parler dans le parc avec un garçon. Cirth ne comprenait pas pourquoi elle avait accepté. Elle était si rouge qu'il était certain qu'elle avait de la fièvre. Et le froid n'allait rien arranger. Toutefois, ce n'était pas son problème.

Alexia lui ramena du chocolat. Le jeune yamilo en savoura l'odeur significative avant de prendre le morceau et d'en croquer un petit bout. Oui, c'était bien ça. Le gout lui plaisait davantage que d'autres types de nourriture. En attendant, la jeune femme s'était rassise à son bureau et lui expliquait comment allait se dérouler l'entrevue. Cirth se contenta de hocher la tête. Toutefois, il prit un temps pour réfléchir lorsqu'elle lui proposa ledit contrat. Il appréciait, d'une certaine manière, la proposition. Elle était clairement faire pour établir un lien de confiance entre elle et les élèves. Toutefois, ce serment de silence, même si il était sécurisant pour le jeune yamilo, pourrait finalement le desservir compte tenu du comportement de certains professeurs à son égard. Il se demandait si ce ne serait pas plus intelligent de ne pas le faire, laissant ainsi l'opportunité à Alexia de répondre aux questions qu'on lui poserait peut-être. Si il prouvait n'avoir rien à cacher, peut-être que ce serait un premier pas vers la confiance et donc vers le retrait du rada'an.

Alexia plongea ses yeux dans ceux, totalement inexpressifs de Cirth.

"Je ne souhaite pas conclure ce genre de pacte. Au contraire, si on devait vous poser des questions à mon sujet, je souhaiterai que vous y répondiez le plus honnêtement possible."

Seulement si on venait poser des questions. Il reprit un carré de chocolat avant de commencer.

"Je n'ai pas connu mes parents et je ne crois pas avoir de famille. J'ai été pris en charge assez tôt par l'orphelinat de feu le Roi Drake Leckard. J'y ai été formé au combat. Quand le demi-plan est tombé, c'est Dame Kubilay enfin Bones qui m'a recueilli. Et comme j'avais l'âge requis, elle a accepté que j'aille à l'académie."

Il marqua une pause. Elle lui avait demandé quels étaient ses rêves et ses peurs. Il ne savait pas trop... Mais il avait bien une aspiration et quelques craintes.

"J'aimerai servir le collectif. Mais je redoute que l'on ne me retire jamais le rada'an même après mon diplôme."

Cirth s'arrêta. Il n'y avait rien de plus à dire d'après lui.

Visite médicale d'arrivée

A son interrogation, très spontanée sous le coup de la surprise, l'infirmière répondit par la négative. Elle n'avait pas peur et ne voyait pas de raisons qui la pousseraient à avoir peur de lui. Il baissa la tête un instant pensif. Il était vrai que, rationnellement parlant, il n'avait jamais rien fait contre elle ou même contre des gens, pas sans raison, et souvent, davantage pour les aider qu'autre chose. Il répondit tout d même par l'affirmation qu'on lui avait faite en arrivant à l'académie.

"On m'a expliqué que les yamilos étaient dangereux car ils ne contrôlaient pas leur soif de sang."

il exposait cela comme on donnerait le temps qu'il faisait dehors, sans se rendre compte que ça pouvait en effet rendre réticentes certaines personnes à le traiter comme tous les autres. C'était le cas de Chad. Il n'en souffla mot, n'en voyant pas l'utilité. De son côté il ne s'était pas rendu compte que ça lui était peut-être bien arrivé une fois à l'orphelinat. Mais une seule et unique fois en plusieurs années... Ce n'était pas suffisant pour pouvoir en extrapoler un comportement nuisible. Après tout, même les humains perdaient parfois le contrôle.

Tendis qu'il conversait avec Alexia, du moins, pendant qu'il répondait à ses questions, le plus honnêtement possible sinon elle ne pourrait pas exercer comme il le fallait ses fonctions, ce qui était une aberration pour Cirth, il en profitait pour observer avec attention les mimiques de la jeune femme, le ton employé, l'expression de son visage. Il se demandait si il pourrait être capable de reproduire de telles expressions si nécessaires ? Sans doute. Il lui suffisait de cerner quand il était le plus propice de les utiliser et de contracter les bons muscles du visage. Le plus complexe serait sans doute de reproduire l'expression de son regard. D'après lui, il n'y avait pas nécessité de comprendre ou de ressentir une émotion pour pouvoir la reproduire. D'ailleurs, il l'avait lui-même expérimenté sur certains de ses camarades. Même eux s'étaient faits avoir alors qu'ils le connaissaient le mieux.

Il revint à la conversation tendis qu'il mettait dans bouche le morceau de chocolat qui était totalement à son gout et qu'il finissait de raconter son "histoire". Alexia semblait parvenir à la même déduction que lui : le rada'an n'était pas nécessaire. Pour autant, il ne percevait pas ce qu'elle voulait dire par "ne pas être une mauvaise personne", on était bon au mauvais selon une norme sociale et la ligne directrice de la morale qui en découlait éventuellement. Bien entendu, il savait que le type d'énergie canalisée pouvait influer sur la perception que les autres avaient de l'aura d'une personne mais, même si ces considérations existaient, elles n'avaient, pour lui, qu'une portée magique. La morale lui passait largement au-dessus de la tête.

Finalement, contre toute attente, elle lui proposa qu'il devienne son assistant. Les yeux rouges foncés du garçon se campèrent dans ceux de l'infirmière qu'il considéra un instant en silence, comme si il évaluait le fait qu'elle soit en train de se moquer de lui. Mais ça n'avait pas l'air d'être le cas.
Un tel poste lui permettrait effectivement de prouver que, contrairement aux idées reçues, il était capable de faire autre chose que de détruire les mages. Même si, en son fort intérieur, sa première pensée avait été de l'enthousiasme à l'idée de pouvoir découvrir les manières dont les mages se soignaient. Car il serait sans doute plus facile ensuite de contrecarrer les agents actifs des potions ou des onguents. Il garda cette pensée pour lui. Si ça pouvait l'aider à se réhabiliter aux yeux des professeurs, il le ferait sans se faire prier. D'autant plus si il n'était pas obligé de porter le rada'an durant ce laps de temps. Il esquissa un sourire. Les conditions étaient idéales.

"J'en serai ravi... cependant... je ne connais rien en matière de soin. Hormis le fait de comprimer une blessure en train de saigner pour éviter de perdre trop de sang, ou de faire une atèle pour aider un membre brisé à se réparer correctement."

Il ne le savait que parce qu'il avait déjà eu à l'expérimenter lui-même. Bien sur, il savait aussi boire une potion de soin, mais il ignorait ce dont elle était composée. Et puis tout le monde savait en boire. Quoi qu'il en soit, il n'avait pas une constitution des plus résistantes, si bien qu'il avait déjà eu la malchance de se faire prendre de vitesse par Lilly qui lui avait brisé le bras que Cirth lui avait alors opposé en guise de protection. La potion de soin y aidant, il n'avait mis que quelques jours à se remettre. Toutefois, il ne savait pas grand chose des soins... Il espérait malgré tout qu'elle voudrait bien accepter de le prendre comme assistant.

Visite médicale d'arrivée

Alexia lui avait expliqué que les gens craignaient ce qu'ils ne comprenaient pas. Cirth hocha la tête. Il ne comprenait pas exactement le sentiment que ces gens là devaient ressentir mais il supposait que ça devait être similaire à la méfiance qu'il avait lorsqu'une nouvelle situation se présentait à lui... Enfin peut-être. A ceci près que lui la jugeait de manière neutre, émotionnellement et intellectuellement. Ce que les autres ne faisaient pas.

Elle lui tendit sa main qui se transforma en une patte de renard Cirth la considéra un instant avant de poser la main dessus, davantage pour l'étudier que pour avoir un geste "gentil" envers elle. Puis il redressa la tête pour observer son expression.

"Vous ne devriez pas vous cacher. Vous êtes ce que vous êtes, ceux qui ne sont pas assez... intelligents...pour vous considérer comme telle et sans préjugés, ne devraient pas avoir voix au chapitre."

Le ton était tout à fait neutre et dépourvu de la moindre émotion. Ce n'était qu'une pensée simple : on se moquait éperdument de ce que les gens pouvaient penser tant que l'on était à l'aise avec ce qu'on était. Certes, politiquement, l'aspect social était important par exemple donc, dans certains cas, il supposait qu'il devait y avoir des raisons de le cacher mais pour lui ce n'était qu'une peur mal placée. Car même en politique, cacher sa nature était une pente des plus glissante.

"Seules les actions importent. Et elles démentent plus facilement les rumeurs que les mots."

Alexia avait passé énormément de temps au chevet des élèves de l'académie, et était connue pour sa douceur et ses soins. Autrement dit, ses actes parlaient pour elle. Pas son espèce d'appartenance. Aussi, Cirth était persuadé que les actions étaient suffisantes pour briser n'importe quel préjugé, même si cela pouvait prendre du temps. Mais peut-être qu'il avait un peu trop d'espoir. Qui sait.

La main de la jeune femme redevint humaine.

Il était reconnaissant, d'une certaine manière, envers Alexia qui avait proposé de faire de lui son assistant. Ca avait en effet plusieurs avantages non négligeables et qui valaient sans nul doute le temps que ça lui ferait perdre en contrepartie. Un échange convenable en somme. Toutefois, il lui semblait qu'il était nécessaire de clarifier, au préalable, l'état de ses connaissances en matière de soin, à savoir déplorable.

Cependant, Alexia sembla ne pas s'en faire et lui confirma être en mesure de lui apprendre. Parfait.

Elle lui demanda finalement si il avait autre chose à lui dire. Il prit un temps de réflexion avant de hocher la tête.

"J'aimerai voir votre véritable forme."

Il songeait qu'il y avait peu de chance qu'elle accepte mais il était plutôt curieux de la découvrir en entier. Si elle refusait, ils passeraient au reste de l'entretien, mentionnant quelques os brisés et réparés, ainsi qu'une cicatrice au niveau du flanc droit. Toutefois, son organisme était dans une forme olympique, si on omettait le fait qu'il ressemble à une allumette et paraisse aussi fragile que cette dernière physiquement.

Visite médicale d'arrivée

L'entretien se poursuivait et le jeune yamilo avait été intrigué par lapatte qu'elle lui avait tendu, autant au sens propre que figuré d'ailleurs. Il l'avait finalement saisie, à la fois pour tenter de changer la vision qu'avaient de lui les "autres" et leur prouver qu'ils avaient tort, bien que dans le fond ça n'avait que peu d'importance, mais il avait également saisi l'occasion pour demander à l'infirmière si elle était d'accord pour lui montrer sa véritable forme, ce qu'elle accepta.

Elle laissa d'abord des oreilles et une queue apparaitre. Cirth l'observa avec curiosité mais sans aucun étonnement. Il avait déjà eu la chance de voir dans des illustrations des hommes-bêtes représentés et l'appartenance d'Alexia à cette espèce peu répandue faisait parti de ses suppositions. Malgré tout, il était intéressant de voir la métamorphose s'opérer. Elle lui confirma qu'il s'agissait bien là de sa forme originelle avant d'ajouter qu'elle en avait une seconde. Cirth n'avait pas du tout noté le rougissement d'Alexia, trop absorbé par ce qu'il voyait.

Sans attendre davantage, la femme se métamorphosa une seconde fois pour revêtir une apparence entièrement animale. Cirth observa le renard des neiges, d'après ce qu'il semblait être du moins, bondir pour s'asseoir dans le fauteuil. Machinalement, il tendit la main vers lui pour toucher sa fourrure. Non pas qu'il doute qu'il fut réel, non c'était simplement que son pelage avait l'air vraiment très doux et que sous cette forme, il aurait facilement pu la vouloir comme animal de compagnie. Sans y réfléchir, et sachant qu'il ne risquait rien, il avait donc essayé de poser sa main sur le sommet du crâne du renard avant de lui caresser le bout des oreilles... avant de se rappeler qu'il s'agissait d'un humanoïde et pas d'un animal, et qui plus est, de l'infirmière elle-même.

Il s'interrompit et recula d'un pas, si elle ne l'avait pas déjà repoussé.

"Je préfère vos formes hybrides et animales à votre forme humaine." finit-il par dire le plus simplement du monde, la remarque tombant comme un cheveu sur la soupe. En tout cas, ça lui confirmait qu'elle n'avait pas à se cacher. Ses formes avaient quelque chose d'étrangement joli. Et puis n'y avait-il pas un professeur ou un remplaçant qui fut lui-même un chat ? Un renard ne choquerait donc personne.

Finalement l'examen physique commença l'instant suivant. Il n'y avait rien de spécial à déplorer chez Cirth si ce n'était qu'il paraissait un peu plus chétif que la moyenne des enfants de son âge. Cependant, son organisme fonctionnait parfaitement et il n'avait aucune cicatrice particulière ni aucune blessure qui aurait été mal soignée, ni aucune pathologie spécifiquement intéressante pour une infirmière. Il la laissa faire son examen comme elle l'entendait avant de revenir à ce qui importait vraiment.

"Quand puis-je commencer à vous assister ?"