Le monde d'en haut

Le travail, le travail, le travail, dans son bureau, le Chancelier était encore penché sur ses multiples dossiers. Le pays était sur la bonne phase après les catastrophes du régicide, la succession anarchique et la guerre des démons. En soit, le gouvernement pouvait admettre qu’il avait eu une certaine chance et tout rentrait dans l’ordre. Mais la paix n’était pas en soit signe de véritable vacance, surtout pas concernant la personnalité des Nogaret et de la Chancellerie.

D’autres problèmes s’annonçaient, plus ou moins terrible probablement, mais mieux valait agir de manière préventive que de compter les coups en ignorant les sources des maux. Cela passait par le problème communautaire qui touchait ce pays depuis des siècles. En effet, les nouveaux riches, si du moins on pouvait les appeler comme ça ne désirait pas prendre le pouvoir pour simplement le prendre, il y avait derrière un véritable désir de réformer totalement ce pays qu’il trouvait obsolète. L’existence de communautés raciales, l’anarchisme magique, tant de problèmes éternels qui devait être évacué, fussent de manière violente.

Un de ses problèmes et sans doute, qui à défaut d’être le plus dangereux, s’avérait être à la fois le plus compliqué et problématique à gérer était celui de la lumière. Aux yeux du Chancelier, les lumineux était de toute manière juste des idéalistes fous qui préférait noyer le monde sous le sang plutôt que d’accepter que le monde est naturellement imparfait et qu’il en sera toujours ainsi, rien ne servait de lutter contre ce qui était éternel. Mettre un tuteur ne serait que placer un couvercle qui finira par sauter un jour ou l’autre.

Le problème avec cette lumière n’était pas son existence en elle-même toutefois. Elle était facilement manipulable parce qu’elle fonctionnait à la différence des ténèbres qui n’était que l’émanation de la folie et du vide d’une âme, sur des concepts et des émotions parfaitement prévisible et qui changeait rarement au fil des siècles. Une rigidité qui leur avait causé des problèmes mais qu’il ne pouvait pas mettre à défaut sans se renier. Non, son problème était plutôt les liens avec la couronne. Le Chancelier savait plus ou moins que la reine essayait de faire l’équilibriste dans ses volontés pacifistes entre la pensée lumineuse et le fait de ne pas braquer les populations qui ne sont elle pas lumineuse. Mais de l’autre, elle avait toujours à ses yeux semblés faible vis-à-vis des actes parfois dangereux que pouvait faire ces derniers. Sans doute le poids des liens familiaux, affectifs et idéologique. Ca restait des elfes, ces gens là étaient tout de même sacrément limités par leur conscience vis-à-vis d’autres espèces la plupart du temps.

Le Paladinat qui était l’exemple parfait de cette lumière douteuse devait donc être analysé par autre chose que le prisme royal biaisé et donc subjectif. De manière officieuse bien sur, de toute manière ce n’était pas comme si tu avais une quelques intentions négatives envers ces derniers, tu voulais juste t’assurer de certaines choses pour savoir si tu devrais dans le futur agir en lieu et place de sa majesté… pour son propre bien…

Le chef des Paladins avaient donc été convié de manière officielle à la Chancellerie, officiellement pour discuter des prérogatives officielles du Paladinat. Parce qu’actuellement, la limite entre leurs missions et ce qu’ils n’étaient pas en droit de faire était totalement flou, et ce serait un problème s’il y avait un couac à ce sujet avec le protectorat, qui devait déjà l’avoir mauvaise que les Paladins tentent de les remplacer dans le cercle, du moins c’est comme ça que cela pouvait être interprété.
L’heure H, le Paladin fut accueillit par la section de la garde en charge de la Chancellerie, avant d’être conduit dans les luxueux locaux du centre de la Chancellerie ou à la plume Edouard retouchait quelques documents.

La porte s’ouvrit, et il fixa Yearius un instant avant de rouler un parchemin et de la donner à une Dame qui était debout derrière lui.

Donne ça à Dekart, et dit lui de ne pas me refaire le même coup deux fois. Ce n’était pas dans ses prérogatives, maintenant je dois gérer la colère de ce vieux grigou. La prochaine fois, il aura la sanction de sa vie.

La Dame prit le parchemin salua le chancelier et sortit de la pièce en faisant un signe de la tête au paladin en sortant.

Le Chancelier s’adossa un instant, avant de tendre le bras nonchalamment.

Messire Clipteum, prenez place je vous prie. J’espère que tout se passe bien pour vous en ces temps de paix.

Le Chancelier montrait une certaine nonchalance à l’égard du paladin, une chose qui pour ceux qui connaissait l’homme était parfaitement volontaire. En effet, le Nogaret comme beaucoup des siens avaient des comportements bien à lui. Qu’il adaptait devant chaque individu en fonction de leurs positions, de la manière d’être extrême froide et absolue. Cela montrait psychologiquement qu’il ne considérait pas le paladin comme un ennemi sans pour autant se mettre dans une position inférieure à lui. Typique du corporatisme judiciaire et administratif aujourd’hui renommé Chancellerie. Des hommes qui comme le paladin était actuellement de l’ombre mais depuis terriblement plus longtemps et qui aujourd’hui à travers les 4 derniers rois, étaient parvenu à faire de l’administration le 3e pouvoir derrière la couronne et la vice couronne.

La Chancellerie à la manière de la vice royauté semblait se satisfaire de l’équilibre actuelle. Il avait été indubitable qu’ils avaient été extrêmement vexé par l’échec de la prise de contrôle de la cité pour imposer de manière beaucoup plus fort leurs volontés d’imposer au royaume un modèle strictement technocratique car cette corporation n’avait jamais eu une véritable respect pour le reste des mages et des souverains qu’elle considérait comme des gens qui si ils étaient cultivés en magie ne connaissait rien à la gestion d’un Etat, la goutte d’eau en trop et celle qui avait joué en la faveur de Drake pour la complaisance de l’administration étant la nomination d’Astoria, cette jeunette paladine.

Mais aujourd’hui malgré cet échec il y a un an, la Chancellerie semblait avoir accepté enfin sa nouvelle situation vis-à-vis de la couronne et du trône. La reine avait en effet eu d’habile de contenter dans la mesure du possible les aspirations des pontes de l’Etat, la vice royauté pour l’étrangère et la refonte du système politique selon les volontés anciennes des technocrates pour la Chancellerie. Au final, dans les deux cas, elles avaient réussis à acquérir une relative fidélité des anciens Drakiste qui à cause de ses positions n’avaient plus aucun intérêt à la voir quitter le trône, sans doute au grand dam, de ses anciens alliés les plus radicaux dont faisait parti les paladins.

Une chose qui n’avait pas échappé à l’administration, qui voyait ce groupe comme une potentielle menace future s’il déviait de l’Etat soit pour s’opposer à ce dernier soit pour faire ses affaires en solo au dépend de ce dernier. Il y avait en effet un certain risque que ces gens là décident de se faire justice soit même après tout, contre l’administration ou la vice royauté très probablement.

Enfin là n’était pas encore le problème et pour l’instant, le Chancelier ne se contentait que de les analyser. Comme il le fit quand le paladin entra dans les lieux, une arme à la ceinture. Personnellement il considérait comme cela comme insipide et pittoresque, ne comprenait toujours pas pourquoi les paladins faisaient ce genre de chose qui les desservait plus qu’autre chose envers les tiers. Se substituer à la garde royale comme il le faisait était en effet un geste d’une profonde arrogance qui devait en coulisse en choquer plus d’un, une chose qui était presque une insulte envers Targatt. Même Astoria en son temps, paladine elle-même n’avait pas osé faire d’un ordre quasiment indépendant, une milice en charge de la défense de la couronne. C’était le genre d’acte dont la reine n’avait pas besoin, et qui ne ferait qu’en sorte que les neutres et les négatifs se méfient de sa personne pour faire des choses digne des lumineux radicaux.

Se posant, Yearius répondit alors au Chancelier sur un ton lacunaire.

-Bien sûr. Les choses rentrent lentement dans l'ordre après la mort de Drake. Pour nous tous. Mais trêve de bavardage, votre excellence. Mon temps est précieux et le vôtre aussi, j'en suis sûr. J'aimerais savoir pourquoi vous m'avez demandé de venir vous voir. Vous n'êtes pas sans savoir que les effectifs militaires sont sous la charge de la reine et non de la chancellerie.

Le Chancelier s’adossa sur son siège.

Il est vrai, je ne suis pas en mesure de gérer les affaires militaires du royaume. Pour être exact, la Chancellerie n’a que 4 rôles, et si vous êtes là, c’est que ça concerne l’un d’eux. Les affaires légales, l’administration, la justice et la direction du gouvernement. La gestion du gouvernement comporte un point fondamental, protéger la reine, et si vous êtes là, c’est justement pour cela.

Et si vous êtes inquiet de cette tournure solitaire de ma part sachez que conformément aux protocoles de la Chancellerie, étant donné l’importance de cette affaire, la reine aura dans les 24 heures, le rapport complet dans son bureau, libre de prendre ou de refuser ce qui pourrait sortir de cette discussion.

Donc…

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je voudrais vous poser deux petites questions.

La première c’est quel sont les priorités que devraient prendre ce gouvernement ? Et la 2e c’est quels sont aujourd’hui les faiblesses que vous voyez dans l’Etat ?

Le ville allait plutôt bien actuellement, mais au fond de lui même, le Chancelier savait que cela ne durerait pas. En tout temps, cette ville avait été bien trop disparate, que ce soit au niveau social, magique et de facto politique. Selon les cadres actuels du pouvoir légal auquel il appartenait, la monarchie élective fondée par l’artéfact du trône n’était politiquement qu’une pure hérésie, qui avait été en partie responsable des conflits magiques successifs que la cité avait connus.Et les règles des Rayem; puis des Leckard sur la ville n’avait fait que prouver cela une fois de plus. La reine se voulait rassembleur, la réalité”*, c’est qu’elle ne pourrait durablement l’être. Il n’y avait aucune chance que les négatifs par exemple, se soumettent à un gouvernement lumino-centré, et cela même si elle élargissait le pouvoir. Il y aurait toujours des failles, des insectes qui useraient des brèches, pour justement empêcher le pouvoir royal et dont il convenait de s’occuper pour qu’elle ne fasse pas une fois encore tomber le pouvoir royal. Les trois derniers rois à leur manière, n’avait osé ou daigné s’en occuper et à cause de ces dernières étaient tous tombé plus bas que terre, jusqu’à la mort par régicide ou suicide officiel.

Ce n’était pas qu’ils étaient incompétents en soit, mais que s’occuper des failles d’un Etat relevait d’un chemin long et périlleux que beaucoup n’avait même pas la possibilité de prendre. En soit, Edouard n’avait pas de jugement sur une possible difficulté de la reine à prendre les choix qui s’incombaient, car même si elle n’était pas faite pour la politique par nature elfique, elle avait étonnement assez bien comprit le poids de son rôle en seulement quelques jours alors que ce dernier pouvait aller à contrario de ce que l’on appelait le bien, la justice ou encore la morale. Ce qui était assez impressionnant venant d’un lumineux et qui sans doute avait eu à jouer dans l’absence de réticence à la fois de l’Administration et de la Grande Armée à accepter un pouvoir, qui devait théoriquement les purger dans les flammes de l’inquisition.

Toutefois, pour garantir l’unité du royaume, la Chancellerie se retrouvait face à une nouvelle problématique. La reine ne devait pas d’elle même combattre les brèches, sous peine de se politiser et de cliver encore plus rapidement que prévu au sein même de son propre camp. Il fallait donc trouver des personnes, qui se salirait les mains à sa place, pour que cette dernière reste immaculée, du moins en surface des problèmes du pouvoir.

Là dedans, Chad pouvait déja avoir son utilité, en tant que pseudo mage noir qui ne se souciait de sa propre réputation. Mais pour les affaires magiques, il ne remplissait tout les critères, il fallait trouver quelqu’un d’autre, et c’est là que lui était venu l’image de ce l’ange qui ne rêvait que de purifier la moitié du monde connu pour imposer sa vision du bien.

-Je suis sûr que vous êtes plus à même de répondre à ses deux questions que moi. Mais si je puis vous aider en vous donnant mon avis, ça sera avec plaisir. Je crois que la priorité de ce gouvernement doit être de prendre enseignement du passé pour construire un futur de paix. Nous avons tous été témoins des ravages causés par le fanatisme, qu'il soit lumineux ou ténébreux. Et nous avons vu ce que donnait un mage sans contrôle qui pouvait s'adonner à toutes les formes de magie qu'il souhaitait explorer. Je crois que la paix est la plus noble des ambitions, mais pour y arriver, il nous faudra encadrer correctement le peuple de Targatt, en commençant par réguler l'utilisation de certaines formes de magie et son enseignement, qui est laissé en roue libre actuellement.

Notre plus grande faiblesse vient de la vice-royauté créée avec une armée de mercenaires scandinave. Laisser une telle force aux portes du royaume en fait une menace pour Targatt qui en ressort d'autant plus affaiblie. Et ses agissements, proches de la traîtrise, ne blanchissent aucunement Wilhelmine. Je comprends bien que la situation actuelle obligeait la reine à accepter, mais elle n'en reste pas moins une menace bien plus grande que tout ce que nous avons affronté. Nous devons renforcer nos effectifs militaires et nos défenses, pour être capable de nous défendre de nous même et de faire face à ses germains, si l'envie leur prenait de s'en prendre à Targatt.

-Bien sûr, ce n'est que mon avis et je n'ai aucune intention hostile. Je m'inquiète seulement de la tournure des évènements.

Se redressant sur son siège, le Chancelier semblait réfléchir quelques instants avant de planter son regard cyan dans celui du paladin.

L’excès de liberté magique de notre royaume est en effet un problème. Jusqu’à présent, les Lois ne s’occupent que des conséquences néfastes après coup, comme si cela n’était des agressions physiques… Ainsi, la justice est quasiment dans l’impossibilité de prouver les attaques des vampires contre des sujets de la couronne. Et honnêtement, aujourd’hui rien que dans les quartiers centraux, à minima, une bonne moitié des crimes magiques ne seront même pas signalés au protectorat.

Vous avez d’ailleurs dû en faire les frais, lors du règne précédent j’imagine.

Ce n’était pas que le Chancelier se dédouanait ou encore s’excusait de sa responsabilité et de ses actions lors de la tyrannie. On pouvait même dire que sauf les Leckard, il fut très probablement une des rares personnes, à ne pas condamner Drake, qualifiant même le génocide, d’une abomibable erreur de parcours d’un vieil homme fatigué, qui ne devait être utilisé pour contester le reste de son bilan favorable à la cité. C’était d’ailleurs probablement en partie de sa faute et de celle que de Wilhelmine, qu’il n’y eu aucun procès suite à la tyrannie et que comble de l’ironie, elle était considéré légalement comme un règne comme un autre, les régicides étant ceux qui furent condamnés à mort.

Non, en fait, c’est simplement que la majorité de ses affaires ne remontaient pas tout simplement. Peu de Leckard avait fini en prison par exemple. Étaient- ils sages ? Non.

Mais cela nécessiterait de revoir toute la politique éducative et sociale de la cité. Et notamment de contester la relative liberté académique d’une certaine institution. Diriez vous qui vous seriez prêt à lui imposer des choses ?

Pour le reste, je ne dirais rien de plus sur les germains, théoriquement, leur chef est bien un régicide.

Il claqua des doigts, affichant alors à côté de lui un écran magique qui avait jadis enregistré le combat pour le service des duels judiciaires. Yearius n’était pas là probablement, mais on pouvait y voir Astoria combattre Drake avant d’être poignardé dans le dos par la germaine.

Tout à fait illégal.

Enfin, vous faites partie de la couronne. J’imagine que vous savez ce qui est le mieux pour vous.

Ce n’est pas que le Chancelier avait quelque chose contre la Grande Armée, mais la situation d’encerclement ne lui plaisait pas non plus.

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