[Chute de dominos] Acte 1 - Académie - Réfectoire

Chute de dominos
Acte I

Suite aux fabuleuses actions de Christina Vale, mercenaire non-mage spécialisée dans la mise hors d'état de nuise des êtres magiques, infiltrée initialement chez les protecteurs, un certain nombre de pierres d'âmes chargées d'âmes de mortels étaient fin prêtes à relâcher, toutes de concert, leur formidable puissance accumulée.

Nul n'est sans avoir que les âmes, ces choses si précieuses, uniques, recelaient une formidable quantité d'énergie. En brisant leur noyau, c'est-à-dire en les détruisant, on libérait cette énergie primordiale et destructrice. Si certains primordiaux, démons principalement, s'en nourrissaient pour accroitre leur puissance, leurs noyaux détruits aussi brutalement généraient une réaction en chaîne et, pour ainsi dire, une explosion capable de raser des villages entiers.

Cette formidable opération, financée par l'Ordalie, se déroulait à la perfection mais elle ne serait un succès qu'en privant de vie des centaines de citoyens de cette maudite ville plein d'aberrations de la nature.

Toutefois, l'Ordalie aurait eu bien plus de mal à réussir sans leur "mage", dont ils ne savaient que peu de choses en fin de compte, ce qui leur convenait aussi tout à fait. Celui-ci n'avait pas hésité à réajuster le plan initial, ni suffisamment grand, ni suffisamment brillant à ses yeux.

Finalement, il s'était révélé être le véritable donneur d'ordre et le maître d’œuvre. Et du côté de l'ordalie, puisqu'il s'agissait d'une part d'une mercenaire, et de l'autre d'un mage, ils pouvaient se permettre de les perdre tous les deux sans que ça ne les ampute de personnes de valeur.

Le mage en question n'était pas sorti de son chez lui depuis que les siens s'étaient fait massacrés et il avait rapidement perdu le compte des jours, des mois et peut-être même des années. Il faut dire qu'un être immortel comme lui avait une perception du temps qui passait quelque peu particulières. Il avait donc passé ces derniers mois à cacher sa présence, ce qui ne lui demandait aucun effort spécifique, et à écouter les pensées de toutes les personnes qui passaient dans son périmètre. C'était de cette manière qu'il avait perçu l'ordaliste initial. Le seul agent dormant de la cellule. Il avait habilement manipulé son esprit afin d'amener l'homme à venir jusqu'à lui. Ils avaient ensuite eu une conversation des plus intéressantes à la suite de quoi, "le mage renégat" avait été inclus dans l'Ordalie.

Quoi qu'il en soit, le maître d'orchestre avait appris à Christina la phrase qu'elle devait prononcer, en effectuant un geste spécifique, pour libérer les sorts à la fois des pierres d'âme et des objets qui avaient été distribués à une protectrice et à trois élèves.
L'homme, d'apparence, avait grande hâte d'entendre les détonations et de ressentir de nouveau la peur et l'effroi se répandre dans la cité comme la plus magnifique des maladies. Elle corromprait les cœurs et les âmes des survivants aussi sûrement que ces bombes faucheraient des vies.

Et enfin, il pourrait sortir du repos qu'il s'était imposé. Enfin, il irait finir le travail pour lequel on l'avait initialement envoyé. Ou plutôt, non... en fait, il ne comptait pas finir ce travail. Il comptait simplement se venger de ces cloportes et faite encore davantage de dégâts s'il le pouvait en dévoilant de nouveau sa présence. Enfin.

Il se servit un thé avec autant d'élégance que d'ordinaire et fila gracieusement jusqu'à sa fenêtre qu'il ouvrit malgré la chaleur de l'été qui frappait durement les êtres et les bâtiments de la cité. Il inspira profondément et, en souriant, commença à siroter son thé dont l'eau était bouillante.

Pourtant, à mesure que la quantité de thé diminuait, il se rendit compte que quelque chose clochait. Il leva la tête vers le Soleil. Midi passé. Elle était en retard. Peut-être pas de beaucoup. Mais c'était toujours trop. L'homme déposa avec douceur la tasse sur le rebord de sa fenêtre et soupira. Il fallait vraiment qu'il s'occupe de tout décidément.

En silence, il tendit la main devant lui et un cercle de vision y apparut. Il voulait simplement vérifier la position de chacune d'entre elles et se rendit compte que deux avaient tout bonnement disparu de la cité. Etaient-elles dans un autre plan ? dans une zone d'anti-magie ? Dans tous les cas, c'était mauvais.

Il récapitula celles qui étaient en place :
- 2 dans le quartier Tamarang où les grandes places étaient les plus nombreuses et où les riches marchands étaient plus concentrés, toutes avec un amplificateur fusionné en elles,
- 1 dans le quartier Vodrel, une sur la place la plus vaste  avec amplificateur,
- 3 dans les souterrains, avec amplificateurs.

Les quatre objets chargés étaient également toujours en sommeil. Bien... Mais il ne pouvait pas se permettre de perdre davantage de temps.

Le cercle de vision disparut et le mage se mit à psalmodier les paroles qui déclencheraient, dans un premier temps, les trois pierres d'âme situées en surface seulement, ainsi que les quatre objets donnés à ces innocentes victimes. Il voulait y aller par étape, comme, pour le coup, Christina l'avait suggéré. Une de ses bonnes idées. D'abord, ils créeraient la panique. Ensuite, ils insuffleraient une terreur qui serait source de maints traumatismes.

"...vicilonür aô." finit-il en fermant les yeux afin de mieux apprécier les sons qui arriveraient jusqu'à lui.

Les âmes contenues dans les trois pierres cachées à la surface furent toutes brisées et leur énergie, libérée et décuplée par les amplificateurs qui y étaient liés, le tout dans de formidables explosions, détruisant intégralement les places sur lesquelles elles étaient, soufflant les gens et fauchant les vies.

Les objets en revanche, comportaient un autre sort. L'activation des objets eut pour effet de déclencher un sort d'asservissement mental avec un unique ordre implanter : faire le plus de victimes dans leur entourage direct.

L'homme rouvrit les yeux, sa bouche se tordant en un sourire mauvais qui se mua en un rire fou tendis qu'il relâchait enfin son aura et reprenait sa véritable apparence, celle d'Asuar, membre de l'escouade qui avait été envoyée initialement pour défaire Targatt, ou, à tout le moins, pour prendre le Trône.


Il avait, à l'époque, affronté deux chasseurs de démons et s'en était tiré sans mal grâce à l'intervention d'une drow qui avait grièvement blessé le seul qui avait été capable de le suivre alors.

La démon sortit par les toits, bras écartés en riant toujours.

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A l'académie, une jeune fille entra dans la réfectoire et se plaça au centre de la salle avant de prononcer le mot implanté en elle, qui ferait exploser le tout : elle et ses camarades éventuellement présents. Explosion réussie, intervention tardive de l'aronade sur zone.

[[u]13 morts, 28 blessés]

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Depuis que Cirth avait compris qu'il pouvait manger tout ce qu'il voulait en se rendant au réfectoire, il se faisait un devoir de prendre au moins un repas par jour. Portant toujours les gantelets que Dame Bones lui avait donné afin qu'il s'entraine à maîtriser ses ombres, non, plutôt pour qu'il s'entraine à faire plusieurs choses en même temps avec elles, il était en train de découper le seul met qui avait trouvé place dans son assiette : un gros morceau de viande encore saignant. Une partie de ses ombres s'occupaient de maintenir le morceau en place tendis qu'une autre extension la découpait.

Comme d'ordinaire, il s'était assis dans le coin le moins peuplé de la salle, sans faire attention aux regards qu'on lui jetait encore parfois, un mélange de méfiance et d'il ne savait trop quoi de plus. Occupé à manger, il n'avait pas fait attention à l'entrée dans le réfectoire d'une énième élève et ne compris d'abord pas ce qui l'avait balayé aussi fort.

Sans crier gare, il avait été brutalement projeté contre une table derrière lui, d'autres ustensiles et mobiliers volant avec lui. Complètement sonné par la force de la petite explosion, il avait mis plusieurs longues secondes avant de pouvoir se redresser -bien que sans avoir encore remis ses idées en place- et constater que son bras avait été fortement endommagé et son oreille arrachée dans l'opération.

Pour empêcher le saignement, il se servit de ses ombres qui vinrent enserrer son bras. Ce n'est qu'à ce moment-là que la forte odeur de sang et de tripes lui firent relever la tête. Il constata le carnage autour de lui. Des élèves semblaient avoir été entièrement... soufflés par une petite explosion fut les dégâts et la forme qu'ils avaient pris. De nombreux élèves étaient par terre. Morts pour certains mais pas pour tous. Il fit quelques pas vers l'épicentre prétendu. Chaque pas le ramenant un peu plus à la réalité, jusqu'à ce qu'il réalise ce qu'il en était réellement, ses yeux se mettant en luire vivement sous le coup d'un mélange d'émotion et probablement, d'un peu d'excitation sous la vindicte qu'une telle chose appelait.

Un gémissement lui fit baisser la tête vers un des blessés. Une bonne partie de son corps avait été arrachée mais il n'était pas encore mort. Il paraissait souffrir le martyre puisque l'élève en pleurait même. Cirth matérialisa un pic d'ombre. A ses yeux, c'était faire preuve d'humanité, de charité même que d'abréger ses souffrances. Il allait l'achever quand le pic s'arrêta à quelques centimètres de sa gorge. Alexia lui avait dit qu'il devrait prouver qu'il pouvait aider. C'était précisément ce qu'il faisait non ? Mais elle lui avait dit qu'il devrait prouver qu'il était capable de "sauver". Après un instant d'hésitation, son pic d'ombre se mua en une forme souple similaire à un tissu et il tenta avec ses ombres de colmater les blessures pour éviter qu'il ne perde davantage de sang en attendant l'arrivée des soigneurs.

Constatant que d'autres élèves étaient mal en point, il tenta de reproduire la chose sur autant de personnes que possible. Toujours partiellement sonné, il se rendit compte qu'il était légèrement nauséeux, non pas à cause de la scène mais bien à cause du choc qu'il avait subi et de l'effort que ça lui demandait de maintenir autant de bras d'ombre.

Il fronça les sourcils, déterminé à tenir autant qu'il le faudrait, même si dans le fond il se souciait peu d'eux, il demeurait loyal à l'institution qui avait accepté de le recueillir.

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Cirth peinait à maintenir suffisamment de pression dans chacun de ses bras d'ombre pour empêcher le sang des blessures de ses camarades de se répandre au sol, sans en mettre trop. Réguler la pression sur la durée était plus complexe qu'il y paraissait comme exercice, une chance qu'il s'y entraine depuis le cours de Kubilay.

Pour autant, un mouvement lui fit relever la tête vers l'entrée en espérant que ce ne serait pas une seconde vague car il n'était pas en état de faire grand chose. Mais il vit au contraire un autre élève plus âgé que lui qui tenait une fille dans ses bras. Ils s'arrêtèrent devant le réfectoire et l'humain sembla... partir en vrille en voyant les cadavres et en regardant Cirth. Est-ce qu'il s'imaginait que c'était son œuvre ? Tant pis, ce n'était pas le moment d'y penser.

Il fit quelques pas vers Ayo mais s'interrompit au milieu de la salle, pris d'un vertige. Il avait compris... pas trop d'exercice physique. Est-ce qu'il pourrait tenir un bras de plus ? Il tenta d'en générer un de plus pour envelopper Ayo comme on l'aurait fait dans un drap. Il avait vu l'infirmière faire ça pour "rassurer" quelqu'un. Cirth ne se rendait simplement pas compte que ses ombres n'étaient pas vraiment le meilleur instrument pour faire ça. D'un point de vue extérieur on aurait davantage dit qu'il se préparait à attaquer qu'autre chose. Il fit reposer le bras d'ombre sur l'épaule d'Ayo avant de poser un genou à terre, une goutte de sueur roulant le long de sa tempe avant de s'écraser au sol, faisant écho au vertige, bien plus puissant que les précédents, qui venait de la saisir.

Il entendit des bruits et le professeur d'invocation entra dans la salle. Il fit apparaitre un oiseau de lumière qui généra une forte lumière régénératrice dans toute la salle, brulant Cirth et ses ombres qui disparurent. Des cloques étaient apparues sur l'ensemble de son corps, y compris les zones jusque là indemnes. Il tomba à la renverse, à peine conscient, la douleur faisant luire vivement ses yeux rouges. Puis, on le téléporta à l'infirmerie.