Biographie

L'inquisiteur du Chaos / Le pourfendeur de crâne / Le défenseur de la justice, ect...

Je suis une fille du vent. Porté par le courant, parcourant la route pour offrir mes services. Abandonnant le confort d'une famille pour découvrir le monde. J'ai toujours été ainsi. C'était ce que je suis. C'est ce que j'étais. À une époque si lointaine qu'il m'est difficile de la voir clairement. J'en ai des brides, des souvenirs. Mais aujourd'hui, je ne suis plus rien. La fille du vent d'autrefois est morte, il y a maintenant plusieurs années. Mais c'est une histoire longue que je n'ai jamais racontée à personne par le passé. Vous serez les premiers à l'entendre de ma bouche et vous serez sans doute les derniers.

Je suis née dans un petit village du sud. Je me réveillais chaque matin en apercevant l'océan au loin et dans mon esprit de petite fille, je me disais que mon monde était parfait. Rien ne pouvait m'arriver de mal et la vie était simple. Cependant, je ne pris connaissance de l'envers du décor que bien plus tard. La vie était difficile pour mes parents. Ils étaient pauvres et l'on ne mangeait pas toujours à notre faim. Aussi, un jour ils prirent une décision qui allait changer ma vie à jamais. Un matin qui ressemblait à tous les autres, je vis un homme que je ne connaissais pas dans le salon de notre petite maison. Il ne ressemblait à rien que je n'avais déjà vu et sans que je m'explique vraiment comment, je sentis presque immédiatement que je pouvais lui faire confiance. Je ne le savais pas encore, mais je venais de rencontrer mon maître. J'avais alors 8 ans...

Hakim était un homme complexe. Capable d'une grande douceur comme d'une implacable détermination. Je pris la route à ses côtés, regardant une dernière fois la maison où j'étais né. Mon père semblait heureux de mon départ, mais pas ma mère. Le dernier souvenir que j'ai d'elle, ce fut son visage silencieux et baigné de larmes en me voyant la quitter pour toujours. Je n'ai jamais revu mon village depuis ce jour et il n'est pas dit que je le revois un jour.

Mon maître était un guérisseur de talent et un hospitalier, comme il se décrivait lui-même. Un jour, alors que nous campions près d'une forêt, je lui ai demandé ce qu'était un hospitalier. En me souriant, il me dit ses mots qui se gravèrent en moi pour l'éternité. "Un hospitalier, mon enfant, c'est une personne qui vient en aide à tous ceux qui en font la demande. C'est une personne qui fait prospérer la vie et la défend, de ses propres mains s'il le faut." J'avais écouté ses explications avec de grands yeux brillants d'admiration. Pour la petite fille que j'étais, ses paroles sonnaient comme la plus douce des musiques. Cependant, je ne pus m'empêcher de lui demander presque immédiatement la raison pour laquelle il m'avait choisi pour l'accompagner. Après tout, il y avait des dizaines d'enfants dans ce village. Ce à quoi il répondit mystérieusement. "Parce que tu es spécial. Un jour, tu comprendras et tu prendras ma suite."

Je ne compris ses paroles que plusieurs semaines plus tard. Au début, il ne m'apprit rien. Je ne lui servais que d'assistance et je compris rapidement en quoi consistait son travail. Mon maître parcourait les routes à la recherche de connaissance et offrant ses services de guérisseur à tout ceux qui en faisaient la demande. Il ne réclamait de l'argent qu'à ceux qui en avaient les moyens, troquant bien souvent ses services contre de simples provisions. Lorsque je lui demandais pourquoi il n’exigeait pas d'être payé comme un prince et logé comme un roi, mon maître s’esclaffa et répondit simplement. "J'ai le pouvoir de donner la vie et d'apaiser les souffrances. À quoi bon courir vers une richesse éphémère"?

Notre petite troupe était composée de plusieurs personnes dont je ne retenais pas le nom, puisqu'ils partaient après quelques jours auprès de maître Hakim. Cependant, il m'accordait toujours un peu plus de temps qu'aux autres. Peut-être en raison de mon jeune âge. Toujours est-il qu'un soir, il m'appela près de lui et commença à m'enseigner réellement son art. Un art qu'il appelait "magie". Malgré ma réticence, après tout les mages avaient mauvaise réputation dans mon royaume natal, j'acceptai de suivre ses enseignements. Il devint rapidement évident que j'étais doué dans ce domaine. Il m'apprit tout ce qu'il savait. Et même plus. M'aidant à canaliser mes pouvoirs et à faire de moi sa digne disciple. Je n'appris pas seulement à guérir autrui, mais aussi à me battre. Comme il le disait lui-même "un bon guérisseur est capable de protéger ses patients à n'importe quel prix." C'était sa façon d'être. C'était ça un hospitalier. Un guérisseur capable de combattre et prêt à tendre la main de manière désintéressé, simplement parce que c'était "juste".

Ma vie sembla simple et ne changea réellement que de longues années plus tard. Mon maître fut invité dans une cité du nom de Targatt pour enseigner son art le temps d'une journée. J'avouais être curieuse, car c'était une cité habitée uniquement par des mages et cachée à la vue du monde. Un rêve pour les mages qui étaient chassés un peu partout dans le monde. Je fus estomaqué par la magnifique vue de cette cité la première fois que je la vis et je pris plaisir à la parcourir en compagnie de mon maître. Cependant, le clou du spectacle fut cette académie où on enseignait la magie. Je suppliai mon maître de l'assister durant le cours et malgré mes 14 ans, il m'accorda cette faveur avec un sourire. C'était la première fois qu'il me confiait réellement une responsabilité et j'étais bien décidé à ne pas le décevoir.

Le cours se déroula magnifiquement bien et durant ce dernier, mon regard fut attiré par un jeune garçon qui devait avoir mon âge. Contrairement aux autres élèves qui écoutaient les discours de maître Hakim d'une oreille distraite, celui-là semblait boire ses paroles et ses yeux brillaient d'admiration devant le travail qu'il accomplissait. Je me souvenais avoir déjà vu cette lumière dans mes propres yeux et après les cours, je lui barrai la route et lui proposai de rejoindre notre groupe. Je ne sais pas pourquoi j'ai agi de cette façon, mais en sachant ce que ce jeune garçon me réservait, je ne regrettais pas mon choix. Mon maître fut surpris lorsque je lui appris ça, il me gronda sévèrement en m'indiquant qu'il aurait préféré que je lui en parle avant de prendre une telle décision. Malgré tout, il céda devant moi et accepta ce nouveau jeune homme dans la troupe. Mais ce ne fut pas si simple.

Pour l'accueillir parmi nous, il devait recevoir l'approbation de sa famille. Les Leckard. La première fois que je vis ce manoir, un frisson de peur me parcourut. Je n'aimais vraiment pas l'atmosphère qui se dégageait de ce lieu et heureusement les négociations ne durèrent pas. Les Leckard acceptèrent de nous laisser Alecto durant 10 ans. Après quoi, il devait rentrer pour retrouver sa place dans cette cité. J'étais folle de joie, mais je n'en avais rien montré. J'étais resté stoïque et avais simplement laissé échapper un sourire discret en direction du jeune homme.

Ce fut ainsi qu'Alecto nous accompagna sur la route. C'était un brillant soigneur qui avait de l'avenir, mais notre maître ne lui accorda jamais la même attention qu'à moi et ne lui apprit jamais réellement à combattre. J'étais heureuse de ne pas perdre son attention, mais j'appris tout de même quelques trucs à mon nouveau compagnon de voyage. Les jours défilèrent, puis les mois et les années. Nous étions souvent ensemble, travaillant ensemble et parlant ensemble jusqu'à tard dans la nuit. Une amitié naquit entre nous, puis un soir, mon avenir changea du tout au tout. Nous étions sur le bord du feu et je venais de souffler mes 18e bougies. Mon corps et mon regard étaient devenus ceux d'une jeune femme et je voyais bien le regard d'Alecto. Lui aussi avait changé et il ne me regardait plus de la même façon. C'est moi qui franchis le pas en lui avouant à mi-voix ce que je ressentais. Comme seule réponse, j’obtins un baiser passionné. Le premier de ma vie. C'était maladroit, mais sincère et porté par cet élan, nous nous sommes éloignées du groupe pour nous explorer mutuellement.

Cette nuit est encore gravée dans ma mémoire et je souris en songeant qu'à cette époque, tout était si simple. Nous avons commencé à former un couple, si nous pouvons l'appeler ainsi et quelques mois plus tard, maître Hakim nous mariait dans le désert que nous traversions. Il n'y avait pas eu de belle cérémonie et de magnifique robe. Simplement le coucher de soleil, témoins de l'amour sincère de deux êtres pourtant différents. Alecto et moi étions très différents, mais c'est cette différence qui nous unissait, je crois. Deux êtres différents qui affrontèrent le monde ensemble. Deux ans après cette magnifique soirée, je donnai naissance au milieu d'une forêt à un petit être que nous avions conçu. Je l'appelai Tryanna et la présenta à son père qui versa même quelques larmes en la voyant. Pour moi, cette vie était parfaite. Je parcourais le monde avec mon mari et ma fille, sans personne pour nous dicter notre conduite. C'était le rêve...

Cependant, les rêves sont illusoires et lorsque les 10 années furent écoulées, Alecto m'annonça qu'il devait revenir à Targatt. Je m'insurgeai violemment. Je ne voulais pas quitter cette douce utopie pour revenir dans cette cité. Enfermé entre quatre murs. Cependant, à force d'argument je finis par céder. Ma fille recevrait enfin une véritable éducation et nous pourrions nous établir dans un endroit calme. J'acceptai, mais un terrible présentement m'avait habité. Je redoutais quelque chose en Targatt, mais je ne savais pas quoi ?

Nous sommes donc revenues en Targatt. Mon mari a ouvert une clinique médicale tout près de manoir de sa famille et ma fille commença à recevoir une éducation digne d'une reine. Je n'aimais pas savoir que cette famille rôdait autour de ma fille, mais encore une fois, Alecto me convainquit du bien-fondé de la chose. Donc, par amour et par confiance, j'acceptai de faire taire mon pressentiment pour adopter cette nouvelle vie. Nous sommes rapidement devenues célèbres dans toute la cité. Les meilleurs guérisseurs de la cité et même du continent. Nous avons nous-mêmes commencé à former des disciples et malgré ce que je souhaitais pour elle, Tryanna devint soldat et suivit les traces de sa famille. Si Alecto était contre, je me contentai de lui espérer le meilleur. Peu importe le chemin, adopté par ma fille, si elle était heureuse. En repensant à cet instant, j'aurais dû lui forcer la main... J'aurais dû...

La suite est plutôt connue, mais je vais vous la résumer. Drake a pris le pouvoir et ma fille est morte dans une révolte, des mains du demi-diable Alrost Erkelion. Lorsque Alecto m'apporta le corps sans vie de ma ville adorée, quelque chose se brisa en moi. J'avais vu la mort des dizaines de fois, j'avais vu mon maître passer l'arme à gauche. Mais la vue du corps ensanglanté et sans vie de ma fille me brisa. Je me retirai dans ma chambre et je hurlai toute ma haine. Je maudissais les Erkelions pour ce qu'ils avaient fait. Je maudissais Drake et les Leckard qui avaient osé me prendre, ma fille. Je maudissais Alecto qui avait refusé de m'écouter. Mais surtout, je me maudissais moi, d'avoir été faible. En ce jour, les paroles de maître Hakim revinrent en ma mémoire. "Est la force de protéger ce que tu as de plus cher et de porter tes convictions". Je porterais mes convictions. Tous ceux qui avaient détruit ma vie le payeront très cher.