Camelia Pirda - L'immigrée amicale

Camelia est née en Roumelie, non loin de la frontière Maggyar, il y a désormais trente-deux années. Elle est née au début du printemps , alors que ses parents vivaient des champs sans faire de tort à personne. Ils payaient les taxes que les nobles leurs demandaient et furent plus qu’heureux à la naissance de leur enfant.

La jeune enfant devint rapidement pleine de vie et courait partout, parlant et dansant sans arrêt ou presque.

En quelques années, la famille Majni s’agrandit de deux autres filles puis, alors que l’aînée approchait de sa première dizaine d’année, un fils naquit enfin. Le couple se rendit cependant compte qu’ils ne pouvaient subvenir aux besoins de cette, plus si petite, famille. Ils décidèrent donc qu’il était grand temps que leur aînée fasse quelque chose de sa vie.

C’est donc quelques jours plus tard, alors qu’elle rentrait des champs avec ses soeurs, que Camelia vit ses parents les attendre avec un autre homme. Ils lui expliquèrent rapidement qu’il s’agissait du gérant d’une compagnie d’artistes ambulants et qu’elle allait désormais le suivre afin de poursuivre ses rêves de danseuse.

La bourse qu’elle remarqua sur la table de la cuisine, en allant chercher ses maigres effets, lui en dit plus long sur ce qu’il s’était réellement passé. Ils l’avaient vendu. Purement et simplement.

Elle passa les quelques années suivantes avec la troupe, obéissant à son nouveau patron, même si intérieurement elle le surnommait le “propriétaire”. Le propriétaire était strict, et n’attendait pas moins que la quasi-perfection de ses artistes, mais il était juste. Elle mangeait à sa faim tous les jours et pouvait se reposer tant qu’elle réussissait ses représentations convenablement, aux yeux du propriétaire, bien entendu. Elle peut dire qu’elle a passé cette poignée d’années heureuse, malgré la nostalgie qu’elle ressentait envers ses pâturages nataux et la rancœur envers ses parents, qui ne quitta jamais son esprit.

Pendant cette période, elle fit aussi la rencontre de celui qui deviendrait plus tard son mari. Izmir Pirda avait été lui aussi acheté à ses parents, moins d’un an après elle. Le jeune enfant, de deux ans son aîné, a toujours été très attirant aux yeux de la jeune fille. Sa peau dorée, ses yeux noirs et ses cheveux blonds comme les blés ne l’ont jamais laissé indifférente, et ce bien avant qu’elle ne sache ce qu’est l’attirance envers un homme.

Lors d’une de leurs représentations, après être arrivés en Istumia, elle repéra une jeune demoiselle qui dansait. Ce fut là sa première rencontre avec la petite Vinrod. Les deux jeunes enfants sont rapidement devenues amies et partagèrent des histoires sur leur vie d’avant.

Quelques mois plus tard, cependant, leur amitié fut déjà mise à l’épreuve par une séparation. Chacune d’elles avait son chemin à parcourir après tout.

Quelques jours plus tard, Camelia découvrit et utilisa son pouvoir pour la première fois. Elle se concentrait sur ce qu’elle entendait et finit par entendre le propriétaire parler. Il était censé être dans le bâtiment à côté, et elle n’a jamais entendu à travers les portes auparavant. Son jeu s’est arrêté assez rapidement, lorsque l’homme et son interlocuteur sont sortis en trombe de la maisonnette. Ils se sont approchés d’elle et lui ont ordonné de les suivre.


Ainsi le patron, en plus d’être le propriétaire, est devenu le maître mage de la jeune adolescente. Il lui apprit rapidement à sentir comment canaliser son pouvoir, afin d’éviter d’user et d’abuser de magie là ou les non mages risquent de la voir. Il lui expliqua, lui inculqua, la notion de secret inhérente à tout mage en dehors des légendaires cités magiques… Il annonça avoir toujours voulu en visiter une, mais ne lui dit pas laquelle. lui disant simplement qu’il la connaissait sous le nom de “la cité du savoir”.

Il lui apprit le vent, comment le contrôler discrètement afin d’améliorer ses prestations, de donner l’impression que sa tenue est plus légère encore. Afin de montrer ou dissimuler ce qu’elle voulait par de simples courants d’air corrigeant la trajectoire de sa robe.

L’année de ses dix-neuf ans, son mentor finit par s’éteindre. Elle avait appris qu’il vivait sous le joug d’une malédiction qui grignotait son espérance de vie, et qu’il cherchait la cité du savoir pour sa grande académie, la rumeur dit qu’on pouvait y apprendre tout ce que l’on désire.

A la mort du propriétaire, la troupe s’éclata rapidement, cinq personnes restèrent dans le groupe de Camelia et, à sa plus grande joie, Izmir en faisait partie. Il faut dire que durant ces quelques années, même si elle ne lui avait pas parlé des réunions privées avec leur mentor, les deux s’étaient pas mal rapprochés, suffisamment en tout cas pour que la réciprocité de leurs sentiments soit évidente aux yeux de tous.

Un an plus tard, leur troupe était de retour sur la sépulture de leur bienfaiteur. C’est aussi ce moment que choisit Izmir pour demander la main de Camelia. Quelques semaines plus tard, ils étaient mari et femme. La vie leur souriait et elle était aux anges. Pour fêter ça, ils décidèrent de tenter un nouveau pays. Quelle erreur monumentale ce fut. En soit, l’idée de changer de pays n’était pas mauvaise, et ce pays n’était pas forcément un mauvais choix non plus… Mais… Ce village fut une escale fatale, un souvenir traumatisant pour notre jeune demoiselle.

L’arrivée au village, au début, se passa bien, même si la plupart des gens se contentaient de les ignorer. C’est normal, se disait le groupe, ils n’ont pas que ça à faire que de regarder des saltimbanques passer.

Ce n’est que lorsqu’ils se sont arrêtés pour la fin de journée, dans une auberge, que les choses ont commencé à empirer. Ils ont, comme à leur habitude, commencé leur représentation, pour donner un aperçu de ce qu’ils feraient le lendemain lorsqu’ils feraient payer. Une pierre fit son entrée, un projectile non prévu qui atterrit aux pieds de notre princesse des vents. La troupe au complet s’arrêta pour chercher le trouble-fête des yeux, mais ne virent que quelques personnes passer, le pas rapide comme s’ils tentaient de ne pas êtres vus aux côtés des voyageurs.

Ils reprirent donc leur démonstration, plus attentifs aux alentours cette fois, mais un second projectile atterrit à côté du premier, sans qu’ils n’aient réussi à en voir l’origine. Comprenant le message, ils rangèrent rapidement leur matériel et rentrèrent à l’auberge, décidant qu’ils ne joueraient simplement pas ici le lendemain. Malheureusement, ils auraient dû partir à ce moment précis.

Cette nuit-là, alors qu’ils étaient épuisés d’avoir finalement consommé leur mariage, Camelia se réveille à cause d’une gêne, une difficulté à respirer qui l’empêche de dormir correctement. Elle trouve qu’il fait bien trop chaud, aussi.

Lorsqu’elle ouvre les yeux, elle oublie de respirer un moment et a l’impression que son cœur rate un battement. Au lieu d’être sombre, ou simplement éclairée de manière blafarde grâce à la lune, la chambre est inondée d’une lumière vive, mouvante, dans les tons de rouge et d’orange. La chaleur qu’elle ressentait telle une gène est encore là, et semble augmenter de seconde en seconde, tandis que sa difficulté à respirer s’accentue aussi.

C’est réellement une vision d’enfer. La lumière, et la chaleur, viennent des flammes qui lèchent leur mobilier. Elle crie, d’effroi, ce qui réveille son mari. Izmir réagit bien plus vite qu’elle, ce qui dans cette situation est le meilleur moyen de leur sauver la vie à tous les deux. Il lui attrape la main et la pousse hors de la chambre, devant lui. Elle se retourne, inquiète pour lui, mais il la pousse encore et toujours.

— Accélère ! Ne te retourne pas !

Ils descendent les escaliers. En bas, elle trébuche et tombe. Il la relève alors qu’un craquement retentit. Les deux lèvent les yeux, une poutre se décroche du plafond. Sans réfléchir, Izmir repousse violemment sa femme avant qu’elle ne se fasse écraser.

Repoussée ainsi, elle n’a que le temps de voir la poutre tomber sur son mari avant de sentir un choc à l’arrière de son crâne. Avant de perdre connaissance, elle a le temps de l’entendre parler.

— Ne me rejoins pas… Vis pour moi.

Quelques heures plus tard, elle se réveille enfin, endolorie. Elle a du mal à respirer, et toute une zone au niveau de sa hanche gauche semble anesthésiée. Elle trouve que c’est étrange, vu que le reste de son corps la fait souffrir. Lorsqu’elle ouvre les yeux, elle voit le ciel. L’aube arrive, teintant la voûte céleste d’un magnifique rouge.

Elle détourne le regard vers sa hanche… Quelle erreur. La vision de chair brûlée, fondue avec le tissu de sa robe de nuit, lui donne un haut le coeur et elle rejette l’intégralité du contenu de son estomac à côté d’elle. Ce n’est qu’après ça que la jeune mariée tente de se relever, sans réussir. Elle est contrainte de ramper pour s’approcher du dernier endroit où elle a vu son mari. Encore une fois, c’est une horrible vision qui l’attend. Elle distingue, sous les restes de poutre, une forme humaine alors que l’odeur de chair brûlée lui prend à nouveau les narines… Cette fois, c’est de la bile qu’elle rejette, brûlant l'œsophage au passage.

Elle reste abattue ainsi encore un moment, avant de finir par réussir à se relever. Il n’y a pas trois semaines qu’elle était mariée, et la voilà déjà veuve. Elle boite, lentement, jusqu’à la grange de l’auberge qui a miraculeusement échappé aux flammes. Elle approche, tel un zombie, de l’unique cheval de la troupe pour tenter de le monter, mais il ne la laisse pas approcher, effrayé par son odeur de mort et la vision de cauchemar qu’elle renvoie. C’est alors qu’un des enfants du voisinage arrive vers elle en lui tendant une piécette. Elle le regarde sans comprendre et ce petit lui dit que sa mère lui avait toujours appris qu’il fallait partager avec ceux qui n’avaient plus rien.

Cette phrase fit ressortir les larmes qui dormaient en elle, tant elle la ramena à la réalité de sa perte écrasante. Son mari, mort… Ses amis, morts… Sa beauté, disparue… Ses aptitudes, disparues… Elle n’avait plus rien...

L’enfant reparti, appelé par son père, il ne voyait pas qu’elle restait immobile, a s’apitoyer sur son sort. Elle reste ainsi quelques instants avant de ressentir un courant d’air. C’est vrai, l’air, la magie, son pouvoir… Elle n’a pas perdu ça après tout. A ce moment précis, elle trouve un but provisoire pour sa vie. Elle cherchera la cité du savoir, ne serait-ce que parce qu’il lui faut un objectif… De toute façon, elle ne peut plus danser vu son état.

Enfin décidée, elle prend le temps d’aller se laver, puis vend son cheval contre de la nourriture et des habits de marche, vu qu’elle n’a plus rien.

Après ceci, elle passe quelque temps à vivre sur les routes, se protégeant des marchands d’esclaves en laissant voir son immonde cicatrice. Celle-ci lui sauve la vie plus d’une fois, mais elle la lui rend bien moins agréable, en contrepartie. Sa magie aussi, lui sauve la vie. Elle a rapidement compris, après l’accident, qu’elle avait désormais un problème de respiration, et se sert alors de la magie aérienne pour forcer plus d’air à entrer, lorsqu’elle le trouve nécessaire.

En quelques années, elle a finalement pris le rythme de son nouveau mode de vie. Elle se laisse inviter à boire, à manger, par des hommes en manque d’amusements et, pour ceux que sa cicatrice ne rebute pas, elle leur laisse l’accès à son corps. Encore une fois, sa magie lui sert. Elle se rend rapidement compte qu’elle peut se protéger avec l’air qu’elle maîtrise, en retirant ce que les plus inconscients lui ont laissé.

Au fil de ses pérégrinations, elle continuait à s’améliorer, à assumer son nouveau mode de vie. C’est donc une femme transformée qui arrive enfin à Targatt. Une femme qui assume l’ambiguité de son mode de vie par rapport à ses croyances. Une femme qui se dissimule derrière elle-même, et qui a finit par se mettre à boire, tant qu’elle le peux, lorsqu’elle ne peut plus supporter sa situation.

Une fois arrivée, elle reconnaît en la cité son objectif, une ville construite autour d’un établissement d’apprentissage, une cité du savoir…

La jeune femme se rend peu à peu compte, une fois en ville, qu’une grande majorités de personnes utilise la magie sans se cacher. Elle comprend donc avoir atterri dans une cité de mages, et décide de s’y arrêter pendant un bon moment. Ce n’est que, un soir où elle se fait offrir un verre en auberge, lorsqu’elle identifie la jeune louve se présentant dans l’établissement qu’elle comprend qu’elle a atteint la ville de son amie d’enfance, Valeriana.

Décidée à s’installer définitivement, du coup, elle se rend aux portes de l’académie, espérant obtenir un poste.

Camelia est une femme d'une trentaine d'année, aux cheveux mauves et aux yeux verts. Sa silhouette, malgré son age, est restée agréable de par les longues années de danse qu'elle a pratiqué, même si on peut remarquer à quelques rondeurs qu'elle ne pratique plus cet art.

Elle possède une cicatrice, au niveau de la hanche gauche. Il s'agit d'une brulûre dont, lorsqu'elle la montre, on peut voir qu'elle s'étant de l'extérieur de sa cuisse, environ à la mi-cuisse, j'usqu'à la taille. La peau y avait à l'époque fondu, fusionnant alors avec les habits qu'elle portait. Cette brulure a eu pour conséquence qu'elle boite désormais. Lorsqu'elle n'est pas fatiguée, ou simplement ivre, elle réussit à bien le dissimuler, de manière à ce que seul un oeil averti puisse le remarquer. Dans le cas contraire, sa démarche claudiquante est à la vue du premier venu.

De plus, lors de l'incendie, l'air chaud lui a brulé une partie de l'intérieur des poumons, ce qui réduit énormément son endurance et la pousse à user d'artifices pour ne pas s'essouffler trop vite.

Camelia a vécu ce qu'elle estime être le pire et s'en est relevé. Cette blessure, physique comme mentale, a changé au plus profond l'être qu'elle était. Elle est d'un optimisme a toute épreuve, capable de trouver du positif dans presque chacune des situations que la vie lui envoie. Il serait bien, cependant, que ce ne soit la seule chose qu'elle ai gardé de cet évènement. Elle sait que son corps est marqué et, bien qu'elle ne l'avouerai à presque personne, elle se sent affectée dans sa féminité. Elle est très insécure de son statut de femme, de sa capacité à plaire, maintenant qu'elle ne peut plus danser. Elle ne montre pas cette insécurité, la cachant derrière une assurance de façade qui fait qu'elle n'hésite pas à montrer sa cicatrice, ce qui finit toujours par la blesser à nouveau.

Ainsi, elle tente de s'oublier dans l'alcool et les lupanar. Il lui arrive parfois de tenter de s'oublier dans les bras d'un homme qu'elle rencontre en taverne mais, dès qu'elle retire la robe, la plupart des hommes fuient.

Elle désire se débarasser de cette blessure, sans savoir encore que c'est une possibilité, mais une fois devant la possibilité, elle se rendra compte qu'il s'agit de l'un des derniers souvenirs de son mari. Elle a pour objectif d'enseigner tout ce qu'elle sait à la génération suivante, désormais, afin de vivre pour son mari. Elle veut éduquer les enfants comme elle l'aurait fait avec les leurs.



En dehors de ça, elle a gardé son esprit jovial d'avant l'accident. Elle est fidèle à ses amis, qui se réduisent actuellement à une unique personne, et tentera toujours d'aider les plus faibles comme elle aurait voulu être aidée quand elle était au plus bas.


Il n'y a qu'une situation ou elle ne pourra venir en aide à qui que ce soit. Une situation qui la fait se recroqueviller sur elle même et se mettre à pleurer, les incendies. La simple vue d'une flamme, aussi petite que celle d'une chandelle, suffit pour la mettre mal à l'aise et réveiller une douleur sourde dans sa hanche, alors une flambée de plusieurs mêtres de haut...