Il y a seize ans, une femme du cercle est tombée enceinte, sans être mariée ni avoir d'amant ou de relations connues. Certes, ce n'est pas rare dans son quartier du cercle, mais son tempérament après ça surpris ses voisins. Elle qui était auparavant discrète, s'est faite de plus en plus orgueilleuse et des rumeurs ont couru selon lesquelles l'enfant ne serait pas issue d'une relation forcée, mais plutôt d'un noble excentrique.
Cependant, lorsqu'on parle de noble excentrique, un nom revient toujours sur les lèvres. Xelcius.
Quelques mois plus tard, un homme est arrivé, Marcus Xelcius. Ce dernier est venu, avec une escorte, chercher la future mère, afin de l'épouser. C'est ainsi que cette jeune demoiselle est devenue Madame Xenophilia Xelcius.
L'accouchement eu lieu sans incident particulier, et l'enfant fut alors nommé Victor. Durant sa petite enfance, sa mère lui racontait régulièrement des contes de son pays d'origine. Dans ces-derniers, les elfes y jouaient toujours le rôle du croque-mitaine, ou de monstres sanguinaires, et ceci aura un impact important pour la vie future du fils.
Dès qu'il eut l'âge de marcher, Victor se mis à se promener de partout, conscient par les actions de son entourage envers ses parents qu'il était le jeune maître de la maison. Il allait donc où bon lui semblait. Petit-à-petit, il atteint l'âge de raison, toujours sans incidents. Il prit à ce moment là conscience des règles explicites et tacites de la maison. Certes les esclaves étaient tout en bas de la hiérarchie, mais certains étaient bien mieux traités par les servants. Il en allait de même pour les servants employés d'ailleurs. C'est du coup vers ces servants et ces esclaves que le jeune Xelcius passait le plus clair du temps qu'il ne passait pas à la bibliothèque familiale. Il en profitait pour apprendre les astuces afin de bien se faire voir par les autres et ses supérieurs.
Marcus, toujours aussi libre, ne s'occupant pas de son fils, sa Xenophilia décida de prendre son éducation en main. Devenue orgueilleuse de par sa montée soudaine et vertigineuse dans l'échelle sociale, elle chercha à inculquer à son fils l'importance des règles de bonne conduite envers les plus nobles que soi. Ce dernier, malgré l'ennui profond qu'il ressentait lors des leçons maternelles, étudia de son mieux, comprenant qu'ainsi il aurait plus de chances de 'survie' dans le monde de la haute société. Il y appris aussi comment traiter les esclaves à la manière de sa mère qui, exécrée par le manque d'attention que son mari lui donnait, se vengeait sur les esclaves dès qu'elle en avait l'occasion.
Le jour de ses huit ans, Victor fut emmené voir un combat dans l'arène par son père. Un repos bien mérité, selon ce dernier. Toujours est-il que cette journée fut une révélation pour le jeune Xelcius. En effet, celui-ci comprit que la magie, aussi puissante qu'elle soit, n'était pas forcément la meilleure solution lorsqu'il vit un mage se faire trancher un membre lors d'un duel avec un épéiste. Cet évènement fut si marquant pour lui qu'une fois rentré la première chose qu'il fit fut d'ordonner à un garde de l'entrainer.
Les trois années suivantes furent rythmées par les cours de sa mère, les séances d'entrainement à l'épée, et les sorties avec son père. Marcus profitait de chaque instant que son fils avait de libre pour l'emmener visiter le cercle, entre les bars et les visites à l'arène. Victor le suivait un peu contraint et forcé, mais finit par prendre tout de même l'habitude de se faire plaisir dès qu'il en a envie. Il a cependant limité ses voyages vers le cercle à juste les visites de l'arène après un léger incident.
C'était un soir, après la visite d'une énième taverne. Marcus et son fils ont croisé la route d'une jeune fille faisant la fête. Avant que Victor ne comprenne quoi que ce soit, il était en train de chanter et danser avec tout un groupe d'inconnus. Marcus a attrapé Victor par l'épaule, l'a secoué et l'a éloigné rapidement de l'énergumène. Si son père n'était pas intervenu, le jeune aurait probablement dansé jusqu'au bout de la nuit.
— Tu vois cette fille, qui t'as fait danser. C'est ta cousine. Éloignes-toi d'elle le plus possible.C'était la première fois de sa vie que Victor voyait son père aussi sérieux, arborant même une expression de dégout sur son visage.
A onze ans, en cadeau d'anniversaire, Marcus lui offrit son premier esclave. Il s'agissait d'un drow, esclave de naissance. Au moment où il vit l'esclave, Victor se figea, tétanisé. Toutes les histoires de son enfance venaient de ressurgir pêle-mêle. Quelques instants après, il se calma un peu et repris contenance. Certes, il s'agissait d'un elfe, mais c'était un esclave, dans l'incapacité de lui faire le moindre mal même si sa simple vue suffisait à faire trembler notre jeune.
Il mit quelques mois à s'habituer à cette présence quasi-permanente, temps pendant lequel son instructeur d'escrime lui mena la vie dure en lui infligeant des défaites plus cuisantes que jamais, frappant l'orgueil de Victor qui savait valoir bien mieux que ça.
Un jour, après avoir subit une défaite plus humiliante que d'habitude, il craqua.
violence :
Gardant son épée d'entrainement, il est rentré dans sa chambre, son esclave le suivant. Il ferma ensuite la porte à clef. Quand il s'est tourné vers l'elfe, après ça, les jointures de sa main droite avaient blanchi, son regard était glacial.
— C'est de ta faute ! Si tu n'étais pas là ! J'aurai pas perdu mes moyens ! Ta faute ! Toi ! Et tous les elfes ! Vous ne méritez rien de plus que ça !
Il continua ses invectives pendant deux longues minutes. Lorsqu'il avait fini, son outil gisait au pieds de l'esclave, brisé. La paume de sa main était ensanglantée. En regardant son œuvre, cependant, il se sentit apaisé. C'était la première fois qu'il levait réellement la main sur un esclave.
Le résultat lui donna pourtant une impression de gâchis, Certes c'était un elfe, mais ça restait son esclave, et ce dernier serait immobilisé pendant quelques mois pour récupérer. De plus, Victor avait l'impression qu'il pouvait s'améliorer. Obtenir un résultat plus satisfaisant, sans pour autant incapaciter son esclave.
Il avait treize ans lorsqu'il découvrit pour la première fois les sirènes dans un livre de son père. Il fut au départ captivé par l'illustration d'une sirène dans un aquarium, se demandant quel type d'hybride cela pouvait être. Curieux comme il était, il se retrouva à occuper tout son temps libre à faire des recherches sur les sirènes, au grand dam de sa mère qui pensait qu'un meilleur sujet d'étude conviendrait mieux à quelqu'un comme lui.
Il y a quelques jours, Victor a eu quinze ans, mais aucune soirée ne fut effectuée pour l'évènement. La famille est certes en heureuse pour leur jeune homme, mais d'autres choses plombent l'ambiance. Principalement, la cité est encore en reconstruction après l'attaque démoniaque, même si cette résidence des Xelcius n'a été impactée que sur le mobilier et les bâtiments. Ensuite, l'élection du jeune Leckard en tant que Président du Sénat a fait le tour de la famille, ce qui s'ajoute à la morosité environnante. Enfin, ce qui a enterré définitivement l'orgueil de cette famille est la frasque de l'oncle fou, Lomac Xelcius.
Certes, les Xelcius sont libres, oui, ils se tirent régulièrement dans les pattes. Mais il y a toujours eu des règles tacites que tous ont respectés... Lomac les a brisé. Ce faisant, il a attiré sur toute la famille l'ire des autres lignées.
Victor en est persuadé maintenant, il est de son devoir de laver l'honneur de sa lignée. Il sait que celui qui réussit à effectuer cet exploit sera celui qui aura le plus de chances d'être désigné futur patriarche. Il se doute aussi qu'avec sa cousine, cette tâche sera plus qu'ardue.
C'est pour ça qu'il commencera à réparer cette image dès que possible. Dès son retour à l'académie, il jouera de ses capacités pour montrer que tous ne sont pas commes ces fruits pourris.